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La musique est essentielle
en franc-maçonnerie. Elle seule peut suggérer l'inexprimable, rendre
intelligible le symbolisme, enrichir la perception du sacré. Elle est la
représentation de ce qui est transfiguration ou transcendance. Elle
signifie la mesure ou la tempérance qui régissent le comportement de
l'initié. Elle exalte les valeurs fondamentales de la fraternité. Aussi
les loges se sont-elles très tôt dotées d'une colonne d'harmonie, un
orchestre de frères pour accompagner et compléter le rituel. Composée
d'instruments à vent, cette formation s'enrichira plus tard d'un piano
qui parfois la remplacera. À chaque instrument - clarinette, hautbois,
cor de basset, basson, violoncelle, etc. - son rôle précis lors des différentes
cérémonies. Au temps de Louis XVI, la période étudiée par Pierre-François
Pinaud, les musiciens francs-maçons, au nombre de 342, déployaient également
leurs talents en ville, dans des salons privés où se produisaient des
orchestres soutenus par des mécènes, ducs ou fermiers généraux, eux-mêmes
initiés, ou encore dans des sociétés de concert où venaient la Reine
et parfois le Roi. Quelles oeuvres jouait-on et qui les jouait ? Côté
compositeurs, une grande variété, et pas seulement les frères Mozart,
Haydn ou Rameau. Les exécutants étaient des frères professeurs ou maîtres
de musique, souvent propriétaires de leur charge. Pierre-François Pinaud
dresse la liste précise des uns et des autres, avec les indications
biographiques et géographiques nécessaires, ainsi que le nom de leur (s)
loge (s) d'appartenance. Des détails vont surprendre : ainsi, le château
de Versailles abritait plusieurs loges actives en matière de musique...
Des loges initièrent des castrats comme Josephini ou Crescentini, qui bénéficiaient
d'un respect inimaginable ailleurs. Des noms familiers surgissent au fil
de l'étude et du dictionnaire qui la complète : Gossec, grand maître de
la symphonie concertante, Yost, père de l'École française de
clarinette, Saint-George, un Antillais qualifié de Mozart français,
Giroust, auteur de la messe du sacre de Louis XVI, Devienne... Tous étaient
francs-maçons et ne s'en cachaient pas.
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