Pour ceux qui ne sont plus

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Cette chanson est celle qui clôture (pp. 26-27) le Recueil de chansons maçonniques publié en 1918 par la Loge Ernest Renan du Grand Orient de France. Les paroles (vraisemblablement écrites dans le cadre d'un hommage aux victimes de la guerre) sont de Marcel Huart, Vénérable de cette Loge ; l'air est indiqué comme celui de Gémissons, gémissons! (air que nous ne connaissons pas) et la version et l'harmonisation en sont de Francis Casadesus.

Refrain

Leur sacrifice fut austère,
Dans leur oeuvre persévérons,
Gémissons, gémissons, mes Frères,
Gémissons, Espérons !

1

Ils sont tombés en pleine gloire,
Ceux des nôtres qui ne sont plus ;
Leur nom restera dans l'histoire
En souvenir de leurs vertus.
Héroïques dans la bataille,
Ils défendaient la liberté
Sous les obus, sous la mitraille,
Nobles martyrs d'humanité.

2

Ils caressaient cette chimère :
Paix au monde, fraternité !
Demain les peuples seront Frères...
Rêve d'hier, réalité !
Dans les combats, dans la mêlée,
Ils portaient haut le pur flambeau
De notre humaine destinée.
Inclinons-nous sur leur tombeau.

3

En eux la chaîne s'est rompue
De l'union des Francs-maçons
Mais leur trépas, dans la cohue,
Fait resplendir notre écusson.
Reconnaissants à leur mémoire,
Nous l'honorons avec fierté,
En attendant que la Victoire
Bientôt, rayonne en la Cité.

Les derniers vers attestent que la chanson est antérieure à l'armistice du 11 novembre : elle fut en effet créée le 5 mai 1918. 

Quelques commentaires

Les effectifs de la maçonnerie ont évidemment été très affectés par l'hécatombe de la guerre de 14-18, au sortir de laquelle le Grand Orient et la Grande Loge de France ne comptaient plus respectivement que 23000 et 6300 membres.

Majoritairement pacifiste jusqu'à la guerre, la maçonnerie française s'était ralliée, après son déclenchement, à l'Union sacrée, avait participé à l'élan patriotique national et avait animé des oeuvres en faveur des soldats au front ou blessés.

Demain les peuples seront Frères (couplet 2) : Après la guerre, de nombreux maçons français soutinrent l'idéal pacifiste de la Société des Nations. Leurs efforts de réconciliation avec la maçonnerie allemande ne rencontrèrent que peu d'échos, celle-ci ayant dans sa majorité proclamé qu'elle abhorrait les associations éhontées de pacifistes et d’internationalistes grossiers qui ont renié leur patrie et encouru le mépris public en rêvant follement de fraternité universelle et qu'elle refusait de prendre part au mouvement humanitaire de fraternisation générale entre les peuples du monde. (source)

On lira avec intérêt, dans le n° 46 (octobre 2008) de la revue la Chaîne d'union, le dossier intitulé France-Allemagne : une fraternité trop retenue.

Comme en témoigne la médaille ci-contre (dont nous ignorons l'origine), un hommage analogue a également été rendu après la guerre 40-45. 

Il faut également rappeler que c'est à l'occasion d'une Tenue funèbre solennelle, organisée le 20 juin 1970 par la Grande Loge de France pour le 25e anniversaire de la libération des camps, que fut recréé par Roger Cotte le Rituel funèbre maçonnique de Giroust.

Cette autre médaille maçonnique (comme en témoignent la datation et les symboles représentés), dont nous ignorons également l'origine, a certainement le même objet.

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