Tarade
L'appartenance maçonnique d'Emile de Tarade (1800-1880) nous apparaît comme incontestablement établie par le fait que, dans son recueil de poésies Fleurs des Champs, il a fait figurer sa chanson maçonnique commençant par Puisqu'un noeud qui nous rend tous frères Rassemble ici des coeurs amis. En outre, dans son article La Franc-Maçonnerie française et les algériens musulmans (1787-1962), Xavier Yacono, décrivant l'accueil triomphal fait à Amboise au Frère Abd-el-Kader, qui avait reçu une députation de vingt-cinq membres des loges de Tours, Nantes et Blois, spécifie qu'il y eut droit au lyrisme d'un poète local, officier en retraite, Emile de Tarade, qui lui adresse une oeuvre de circonstance se terminant ainsi : «Amboise, pour sa part, ne t'oubliera jamais» (Tarade a d'ailleurs publié ce texte, mais nous n'y avons pas eu accès). C'est la découverte de cette chanson qui nous a amené à nous intéresser à lui, et à découvrir ainsi qu'il avait été un compositeur assez apprécié de son temps, en tout cas dans sa région tourangelle. ci-contre : ce portrait de Tarade figure dans sa Notice généalogique et biographique sur la famille de Tarade et sur ses alliances. |
On en trouve en effet une biographie très complète au bas d'une page du site d'Yves de Tarade. Nous la résumons ci-dessous.
Gilbert Philippe Emile de Tarade (1800-1880), militaire par tradition familiale, devint en 1821 Garde-du-Corps de Louis XVIII et prit sa retraite comme lieutenant de cavalerie en 1846, après être resté sans affectation depuis 1830. Cela lui permit de se vouer aux lettres, aux sciences et aux arts, et de faire une nouvelle carrière de conférencier et d'homme de lettres.
Dans la liste de ses oeuvres, on peut citer :
Elément d'anatomie et de physiologie comparée
Chère Touraine, recueil de poésies.
Education du chien, ou traité complet des moyens de cultiver l'intelligence de ce précieux animal, d'obtenir de lui toutes sortes de services.
Un voyage d'artiste (Paris, 1867)
Fleurs des Champs, recueil de poésies (Tours, 1868) du volume 2 duquel est tirée la chanson prémentionnée (NB : le premier volume est également disponible sur Gallica, qui le baptise erronément T. 2).
Mais il se livra aussi à la composition, comme en témoigne cette citation du site prémentionné :
Elève et ami de Pascal Taskin et du compositeur espagnol Ferdinand Sor, il composa beaucoup de musique, notamment plusieurs quatuors, quintetti et sextuors pour piano et instruments à cordes, divers morceaux de musique militaire et neuf symphonies à grand orchestre, dont deux avec choeurs. Plusieurs de ces compositions ont été exécutées avec beaucoup de succès à Tours.
La Chronique musicale de 1873 nous apprend aussi (p. 69) qu'il a composé une musique pour le Rhin allemand de Musset et (p. 74) qu'il fit les paroles et la musique de Patrie.
Son amitié avec Sor est confirmée par le fait qu'on trouve une chansonnette de Tarade, mise en musique par Sor, à la p. 217 du recueil Fleurs des Champs.
Tarade fut également un grand philanthrope, comme en témoigne ce texte de 1867 :
Mû par ses idées philanthropiques Monsieur de Tarade a toujours fait à son pays d'adoption tout le bien qui dépendait de lui. D'une ardeur infatigable dans la pratique de la bienfaisance, on le trouve constamment à la tête des oeuvres ayant pour but d'améliorer le sort de la classe nécessiteuse. C'est ainsi que dans un temps où, à Ambroise, les souffrances de l'industrie manufacturière donnèrent lieu à un défaut de travail, et à cette autre époque si douloureusement marquée par des inondations désastreuses, on dut à son initiative l'organisation de magnifiques fêtes de charité dont le résultat vint apporter du soulagement à beaucoup de misères.
La création de la société alimentaire, qui fonctionne depuis douze ans à Tours, avec un grand succès, provient également de la généreuse initiative de Monsieur de Tarade. Le 5 novembre 1866, le conseil municipal de cette ville, à l'occasion d'une nouvelle libéralité de Monsieur de Tarade, a exprimé les sentiments de reconnaissance des habitants de Tours.
C'est aussi lui qui offrit à la ville de Tours un buste de Napoléon III par Jean-Auguste Barre (1811-1896), le portraitiste attitré de l'empereur.