CANTIQUE

Sur l'Air : Chantez, dansez, amusez-vous.

Un flatteur débite à grands frais 
Des éloges payés d'avance ; 
Mes Frères, n'employons jamais 
Cette mensongère éloquence ;
Sans aucun art ici chantons 
Les mœurs, les vertus des Maçons.

Dans le monde on fait peu de cas 
D'une aimable et douce franchise ; 
Vain étalage ! ... On n'y croit pas ; 
Dire ce qu'on pense est sottise,
Chez les Maçons la vérité 
Préside avec l'aménité.

L'austérité communément 
Dans le monde devient rudesse ; 
Elle s'accorde rarement 
Avec l'aimable politesse 
Chez les Maçons l'austérité 
S'unit avec l'urbanité.

Chez les profanes trop souvent 
La liberté devient licence ; 
On finit par être indécent,
Quand par plaisanter on commence 
Chez les Maçons la liberté 
Ne fait point rougir la gaîté.

Ce parvenu qu'au premier rang. 
Pour s'amuser le hasard place, 
Se croit un Personnage, un Grand,
Dès qu'il commande avec audace, 
Chez les Maçons l'autorité 
Ne parait qu'avec la bonté.

Le profane ordinairement 
Méconnait toute obéissance, 
Et Thémis difficilement
Par ses Huissiers obtient silence, 
Chez les Maçons un seul maillet 
Obtient un silence parfait.

 Pour entrer chez un grand Seigneur, 
Pour en obtenir audience, 
Il faut avoir un protecteur, 
Doux billets, lettres de créance, 
Chez les Maçons, sans nul crédit, 
On dit un mot, ce mot suffit.

Près d'un riche votre parent, 
Vous vous hasardez de paraître,
Modeste, vêtu simplement, 
Il rougit de vous reconnaître, 
Chez les Maçons, par un signal, 
Le plus grand devient votre égal.

Le profane nonchalamment 
D'un ami reçoit la supplique ; 
Il aurait plus d'empressement 
S'il brûlait d'un feu maçonnique,
Faire bon feu, très-parfait feu, 
Pour le Maçon n'est pas un jeu.