Admis au Temple ...

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Cette page est la page 11 du recueil nantais intitulé Chansons et pièces fugitives par le Frère Roche en 1863. La chanson est basée sur l'opposition entre ceux qui ne voient rien et ceux qui voient fort bien.

Voir ici sur l'air des Deux Edmond.

Air des Deux Edmond

  

 

Admis au Temple avec mystère
Le profane est devenu frère ;
L'oeil délivré de tout lien,
                Il ne voit rien.         (Bis)
Mais, pour secourir l'indigence,
Eclairé par la bienfaisance,
Sans recourir à l'opticien,
               Le Maçon voit très-bien.         (Bis)

 

Bosco, parmi mainte escapade,
Fait disparaître une muscade
Par un infaillible moyen ;
                On n'y voit rien.         (Bis)
Mais qu'un ambitieux grimace
Pour escamoter une place,
Un : vive le roi citoyen !
                 Chacun y voit fort bien.         (Bis)

 

Un Diogène un peu sophiste,
Lanterne en main, cherche un carliste,
De la doctrine vrai soutien ;
                  Il ne voit rien.         (Bis)
Mais près du pouvoir qui l'accueille,
Alors qu'il guigne un portefeuille
Dont il prétend faire le sien,
               Monseigneur voit fort bien.         (Bis)

 

Aux noirs débats de la justice,
Aux fonds secrets de la police,
Qu'engraisse le bon plébéïen,
               Il ne voit rien.         (Bis)
Mais Juillet a montré qu'en France,
Pour châtier, et d'importance,
Les suppôts d'un roi très-chrétien,
               Le peuple y voit fort bien.         (Bis)

 

 

 

 

La chanson est publiée en 1863 (sous l'Empire) mais elle est sans doute bien antérieure puisque certaines des allusions politiques (de tendance manifestement libérale) qu'elle contient sont relatives à 1830 et au règne de Louis-Philippe.

Le carlisme (mentionné au 3e couplet) est aussi un mouvement (considéré par les libéraux comme passéiste, conservateur et clérical) qui à cette époque s'était manifesté en Espagne par deux guerres, la première en 1833-1840 et la deuxième en 1846-1849.

Le 4e couplet vise évidemment la révolution de juillet 1830 qui chassa Charles X, le roi très-chrétien (ultra et bigot) et châtia ses suppôts (comme le premier ministre Polignac, condamné alors à la prison perpétuelle) pour faire place au roi-citoyen.

Bosco et la muscade

Le Bosco mentionné au 2e couplet est Bartholomeo Bosco (1793-1862), prestidigitateur fameux. 

Selon sa propre publicité, il pouvait escamoter une maison aussi facilement qu’une muscade. Il était baptisé le roi de la muscade à cause de son tour de gobelets le plus célèbre (l'expression passez muscade ! trouve son origine dans ce tour, analogue au jeu du bonneteau).

Cette gravure de Grandville, publiée le 29 novembre 1832, s'intitule Monsieur Bosco prestidigitateur : Attention messieurs et dames à ce joli tour ! s'exclame Bosco en s'adressant à son public. Mais en fait, ce qu'on voit c'est Louis-Philippe (bien reconnaissable à ses favoris et au toupet à la Trump dont l'ont affublé, comme on voit ci-contre, les caricaturistes du temps) en train d’escamoter le Palais Bourbon, siège de la Chambre.

Comme le montre le tableau ci-dessus de Jérôme Bosch (c. 1450-1516), L'Escamoteur, le bonneteau était (déjà au Moyen-Age) une escroquerie bien connue.

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