VAUDEVILLE POUR LA COMÉDIE DES FREEMASSONS

 

Dans son ouvrage Les ducs sous l’acacia, ou les premiers pas de la franc-maçonnerie française 1725-1743, (Libr. Vrin Paris 1964), Pierre Chevallier reproduit (pp. 211-2, en mentionnant comme source Bibl. Arsenal. Ms. 2757, pages 135-136. Œuvres de l'abbé Aunillon) ce VAUDEVILLE POUR LA COMEDIE DES FREEMASSONS en précisant (p. 91) qu'il a été sans doute composé à l'occasion de la pièce de Clément de Genève, l'Hyperdrame des Francs maçons.

Membre de la Loge Coustos-Villeroy, l'abbé Aunillon (1684-1760) était, comme l'abbé de l'Attaignant, un de ces abbés de cour entrés dans les ordres par obligation et sans vocation, et plus soucieux de mondanités et de frivolités que de religion. On l'appelait le curé de la Comédie car il fréquentait assidûment la Comédie Française où, selon un auteur du temps, il voltige comme un papillon autour des actrices, ayant toujours le petit mot à leur dire à l'oreille, comme un confesseur. La légèreté de ses moeurs lui avait valu un autre surnom, celui de Conillon. 

Il a publié en 1728, sous le pseudonyme de Chevalier de Doué, la comédie les Amants déguisés et en 1750 le roman philosophique la Force de l'Education. Il écrivit également en 1749 la comédie Les Effets de l’amour et de l’amitié ou l’Impromptu de Chantemerle. Ses Mémoires de la vie galante, politique et littéraire n'ont été publiés qu'en 1808.

1

Célimène dans son jeune âge 
De l'himen fit l'apprentissage 
Elle en prit plus d'une leçon 
Elle est aujourd'huy je le gage 
Avec l'époux qui la crut sage 
Plus discrète qu'un freemaçon.

2

Un parvenu dans l'opulence
De son train et de sa dépence 
Parle sans rime ni raison
Mais sur son obscure naissance
Il garde un si profond silence 
Qu'on peut le croire un franc-maçon.

3

En vain par un air doux et tendre
Sexe adroit vous voulès surprendre 
Un secret que nous vous cachons
Vous qui sur l'amoureux mistère 
Avec nous scavés mieux vous taire 
Que les plus zélés free maçons.

4

On peut apprendre en bonne école 
A distinguer l'ami frivole
Du sincère ou du fanfaron
Mais pour faire un ami solide 
J'entens la raison qui décide
Qu'il faut choisir un free maçon.

5

Nous devons cet avis aux belles 
Qui cherchent des amants fidelles 
Qu'elles écoutent nos leçons 
Parmi ceux qui peuvent leur plaire 
S'il en est qui sachent se taire 
C'est dans l'ordre des freemaçons.

6

Nous avons d'un peuple de frères
A vos yeux tracé des mistères
Qui sont lettres closes pour vous.
Les habits ne font pas les hommes 
Par eux free maçons que nous sommes 
Nous n'en sçavons pas plus que vous.

7

Si notre pièce a paru bonne 
Que le partere la couronne 
En applaudissant nos chansons. 
Mais s'il refuse ses éloges 
Que sa critique pour les loges 
Soit le secret des freemaçons.

Le titre de vaudeville indique que cette pièce était destinée à être chantée, mais aucune précision d'air n'est donnée. Notons que la structure des couplets est symétrique à celle des couplets chantés par les protagonistes de la pièce de Clément.

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