Les chansons de l'Ordre de l'Etoile pour le Marquis de Gages sublime

 

Comme en témoigne sa correspondance avec le Comte de Clermont, Grand Maître de la Grande Loge de France de 1743 à 1771 (cfr. par exemple Pierre Chevallier, Histoire de la Franc-maçonnerie française, T. 1 l’École de l’Égalité, Fayard, 1974), le marquis de Gages (portrait ci-contre) fut un grand collectionneur de grades et de rituels, et un grand nombre de rituels manuscrits lui destinés, de tous grades, ont été conservés.

L'un de ceux-ci s'intitule l'Ordre de l'Etoile pour le marquis de Gages sublime (NB : selon Ligou dans son Dictionnaire de la Franc-maçonnerie (PUF), sublime ou suprême désigne le grade le plus élevé d'un système).

Il s'agit d'une espèce de société paramaçonnique, en 3 grades, dont on sait peu de choses. Ligou signale un éphémère Ordre de ce nom, répandu surtout en régions protestantes, mais sans donner d'autre détail que créé vers 1740 à Lausanne. Hivert-Messéca signale ici que le pasteur Rabaut y aurait appartenu à Nîmes en 1749.

Gages étant bon catholique (et vivant en Hainaut), son Ordre de l'Etoile n'est pas nécessairement celui-là. Mais la curiosité en matière de rituels exotiques qui régnait à cette époque ne l'exclut cependant pas.

Cet Ordre est bâti sur le même type de fonctionnement que les grades bleus maçonniques, dont toutes les caractéristiques ont leur transposition : serments, noms des fonctions, pas (au 2e grade, c'est une triple génuflexion), mots, tableaux (très complexes), signes, bijoux, accessoires, ... Il y a même un "alphabet" basé sur l'étoile coupée, selon le même principe que celui des alphabets maçonniques :

Relevons quelques caractéristiques de cet Ordre :

NB : la légende d'Enoch (fils de Jased, à ne pas confondre avec le fils de Caïn) ou Hénoch (et non Henoc) mentionnée ci-dessus est également citée dans le Discours abrégé sur l'origine de la Maçonnerie figurant au début de l'Ecole des Francs-Maçons ("A Jérusalem", 1748 - repris dans Coutura), dont l'auteur - qui ne fait d'ailleurs là que paraphraser les Constitutions d'Anderson (le Chant du Maître qui en fait partie y fait aussi allusion) - la raconte dans des termes voisins, mais avec quelques détails supplémentaires. Dans un Rituel d'Heredom de Kilwinning, on trouve d'ailleurs, parmi les secrets réservés aux heureux élus, l'explication suivante sur Enoch (qualifié, avec Elie, de personne qu'on dit n'être jamais morte) : Enoch, le cinquième après Seth et le septième après Adam qui prédit le déluge et l'embrasement général ; c'est lui qui pour empêcher que la connaissance des arts libéraux et des sciences n'échappât à la mémoire du genre humain, érigea deux colonnes, l'une de pierre et l'autre de brique, sur lesquelles ces arts furent gravés, afin que si la colonne de brique était emportée par le déluge, il restât celle de pierre et Joseph l'historien (ndlr : il s'agit de Favius-Josèphe, effectivement contemporain de Vespasien) nous apprend qu'on la voyait encore de ses jours en Syrie.

On voit que l'imagination débridée qui présidait alors à la fabrication de grades en tous genres était ici aussi à l'oeuvre ...

Trois chansons, totalement inconnues de tous les recueils maçonniques classiques du XVIIIe, figurent à la suite des Rituels de cet Ordre. Elles sont toutes les trois en relation avec l'Etoile. Chose curieuse, deux d'entre elles sont mentionnées comme émanant d'auteurs toulousains - ce qui indique peut-être que cette ville pourrait avoir été à la source de la transmission au marquis ? Il faut en tout cas noter que Pérignon de Progent, premier Surveillant de la Loge de Gages et compilateur du recueil des Rituels de Gages, était d'origine toulousaine.

Ces 3 chansons sont les suivantes :

  1. Chanson de l'Ordre

  2. Amis chantons l'avantage du doux noeud qui nous unit

  3. Astre brillant qui m'éclairez.

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