Points de vue profanes sur les maçons en 1737
Cliquez ici pour entendre un extrait (le 4e couplet) de l'enregistrement de cette chanson sous le titre Les fre-maçons, sur le disque noir (Chant du Monde LDY-4107) Histoire de France par les chansons, vol. 7 (Régence et Louis XV)
Cette chanson, datant de 1737, n'est pas une chanson maçonnique à proprement parler ; le fait qu'elle reflète ce qu'à l'époque (qui est celle où en France on commence à parler beaucoup du sujet) on disait des maçons nous a cependant poussé à la publier sur ce site.
Nous l'avons trouvée dans le Chansonnier historique de Raunié, vol. VI, pp. 174-9.
Dès le premier couplet, on rencontre l'idée (qu'on trouve ailleurs à la même époque) que la maçonnerie n'est en fait qu'un prétexte pour banqueter. Dans les suivants, il est fait allusion au soupçon imaginaire que contestera Clérambault en 1743 et qui était alors fort répandu.
Jusqu'à la découverte de l'enregistrement mentionné plus haut, nous n'avions aucune indication sur l'air, mais avions émis, d'après une chanson apparentée, l'hypothèse que cela pouvait se chanter sur l'air Du haut en bas (cliquez ici pour l'entendre, séquencé par Acélan).
Les francs-maçons
Des
francs-maçons L'égalité |
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Sans nul égard Contre eux pourtant, |
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Dans leurs repas, Hé ! Qu'est-ce
donc ? |
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Sous ce secret, De leur destin, Par trop d'excès, En gens sensés, |
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Quoi qu'il en soit,
En gens d'esprit, Qu'est-ce, en effet, Cet appareil |
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Ainsi grossit,
Chers francs-maçons, Conclusion, |
Il est également intéressant de lire les commentaires que, après avoir cité le Journal de Barbier (T. 3, pp. 80-81), Raunié fait en 1882 sur cette chanson, dans une note de bas de page :
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« Nos seigneurs de cour ont inventé tout récemment
un ordre appelé des Freemassons, à l'exemple de l'Angleterre où il y a ainsi différents ordres particuliers ; et nous
ne tardons pas à imiter les impertinences étrangères. Dans cet ordre-ci étaient enrôlés quelques-uns de nos secrétaires
d'État et plusieurs ducs et seigneurs. On ne sait quoi que ce soit des statuts, des règles et de l'objet de cet ordre
nouveau. Ils s'assemblaient, recevaient les nouveaux chevaliers, et la première règle était un secret inviolable pour
tout ce qui se passait. Comme de pareilles assemblées aussi secrètes sont très dangereuses dans un Etat, étant
composées des seigneurs, surtout dans les circonstances du changement qui vient d'arriver dans le ministère, M. le
cardinal de Fleury a cru devoir étouffer cet ordre de chevalerie dans sa naissance, et il a fait défense à tous ces messieurs
de s'assembler et de tenir de pareils chapitres. » (Journ. de
Barbier.)
Barbier a tort de considérer la franc-maçonnerie comme une invention des seigneurs de la cour ; c'était une importation d'origine anglaise. L'ordre des francs-maçons, que l'on fait d'ordinaire remonter à Hiram, architecte du temple de Salomon, ne fut introduit en France que vers 1725 par des Anglais, qui fondèrent la première loge dans la maison d'un cuisinier de la rue des Boucheries. C'est l'élection du grand-maître en 1737 qui appela sur l'ordre l'attention de la police et provoqua l'interdiction prononcée par le cardinal de Fleury. |
Bernard Faÿ cite (p. 168) 5 des 18 couplets de cette chanson dans La franc-maçonnerie et la Révolution intellectuelle du XVIIIe siècle (Ed. de Cluny, 1935).
Dans la Franc-maçonnerie sous les Lys (Grasset, 1953), Roger Priouret (p. 7) en cite également trois couplets.
Le premier couplet a été modifié pour en faire une chanson plus maçonnique.
Priouret (p. 44) cite également une autre chanson, plus perfide puisqu'elle fait écho aux rumeurs - le fameux soupçon imaginaire dénoncé quelques années plus tard par Clérambault - que l'exclusion des dames de leurs assemblées avaient générées vis-à-vis des moeurs des maçons. Elle a été composée pour la Noël 1737 et le poupon qui y est mentionné est celui de la crèche.
De toute
République
Chassé honteusement,
Vint un corps socratique
Tumultueusement.
Le poupon s'écria : quelle est cette troupe ?
Ce sont les
francs-maçons
Don, don,
Qui, si nous n'étions là,
Là, là,
Vous tâteraient la croupe.
On peut avec certitude (cfr. les caractéristiques répétitions la la et don don) identifier l'air de cette chanson à celui des Bourgeois de Chartres - qui est précisément un Noël : cliquez ici (midi) ou ici (MP3) pour l'entendre, d'après la partition de la p. 423 de la Lire.