Inauguration d'un Temple à Strasbourg en 1826

Ces deux hymnes sont données à la fin (pp. 164-5) de l'ouvrage (s. d. ; 1826 ou 7 selon les sources) de Riebesthal, Rituel maçonnique pour tous les rites, avec la note de bas de page suivante :

1 Cette hymne ainsi que l'invocation à Dieu ont été faites par le Frère Fargès-Méricourt, Vénérable  de la Respectable Loge des Coeurs-Fidèles à l'Orient de Strasbourg. Les symphonies d'accompagnement à grand orchestre ont été composées par le Frère Fournera, intendant d'harmonie, et elles ont été chantées pendant la cérémonie d'Inauguration du nouveau Temple de ladite Loge  : la première, au moment où le triangle lumineux, le soleil et la lune ont été dévoilés ; la seconde après la fin de l'invocation de Salomon.

Riebesthal

Après une carrière militaire qui en fit un Chevalier de la Légion d'Honneur et qui le mena notamment pendant 10 ans en Italie, Chrétien-Guillaume Riebesthal (1769-1842) rentra à Strasbourg en 1812 pour y devenir contôleur en chef de la manufacture impériale de tabacs. 

Maçon depuis le XVIIIe siècle, il se montra particulièrement féru de hauts grades écossais et égyptiens.

Voir à son sujet l'article de Pierre Mollier Chrétien-Guillaume Riebesthal: From the Religions of the Revolution to Paramasonic Ceremonies, paru en 2013 dans le premier numéro de la revue Ritual, Secrecy, and Civil Society (pp. 46-50) ; cet article est la traduction d'un texte paru en français en 2011 sous le titre Chrétien-Guillaume Riebesthal ; des religions de la Révolution aux cérémonies paramaçonniques mais à notre connaissance pas disponible sur le web.

Son ouvrage Rituel maçonnique pour tous les rites innove en proposant des Rituels pour diverses autres occasions, telles que la Fête du Réveil de la Nature, les Solstices d'été et d'hiver, le Baptême maçonnique, la Confirmation d'un louveton, l'Affiliation entre deux Loges, les Pompes funèbres.

Il termine en établissant un calendrier des 48 thèmes (48 vertus) auxquels l'Orateur devra consacrer son discours au cours de Travaux d'instruction séparés des Tenues, se tenant chaque dimanche (sauf ceux des fêtes solsticiales et équinoxiales) et effectués en présence des Soeurs d'Adoption, des louvetons de plus de 15 ans, et d'un orchestre.

Riebesthal se manifeste comme un maçon très formaliste, très religieux (les rituels sont remplis d'invocations à la divinité) et très imbu d'apparat et de Hauts Grades.

Un exemple particulièrement cocasse de ce dernier travers est dans son premier chapitre, consacré au costume du président de la loge pour les cérémonies contenues dans le présent rituel : 

Comme les cérémonies contenues dans ce rituel exigent toute la splendeur possible, le président de la Loge, s'il possède le grade de Rose-Croix, sera costumé, ainsi qu'il suit, dès le commencement des travaux. Il sera vêtu d'une robe noire à manches larges, collet blanc plissé ; par dessus une ceinture rouge, garnie de franges d'or et nouée du côté gauche auquel sera suspendu le glaive dans son fourreau. Il sera chaussé de bottes avec des éperons. Il portera par dessus la robe noire, la chasuble de Rose-Croix, et le bijou de ce grade, d'abord en noir et ensuite rouge ; enfin il sera couvert d'un chapeau rond entouré de crêpe rouge, ayant au côté gauche un noeud dont le milieu sera de crêpe noir, et qui sera surmonté de trois plumes blanches ...

[ndlr : Si le président de la loge n'est que Maître, il a droit aussi à une robe, mais moins richement ornée, et à un chapeau, mais dont les plumes sont noires].

L'auteur des textes de ces deux hymnes, Philippe Jacques Fargès-Méricourt (1776-1843), fut avocat, écrivain et longtemps Vénérable de la Loge strasbourgeoise des Coeurs-Fidèles ; il est l'auteur de deux cantiques solsticiaux en 1827. La musique est de Fournera, qui résidait effectivement à Strasbourg à ce moment.

La cérémonie mentionnée par Riebesthal avait eu lieu le 2° jour du 5° mois de l'année 5826 (2 juillet 1826) pour l'inauguration du nouveau Temple de cette Loge. Il la décrit en détail dans le chapitre Cérémonial de l'Inauguration d'un nouveau Temple maçonnique (pp. 83-108) de son livre. C'est un rituel extrêmement pompeux et religieux, mené par des Installateurs qui sont obligatoirement membres d'un chapitre et revêtus d'un costume correspondant à leur grade (i. e. un manteau cramoisi ou d'azur brodé d'or ou d'argent)

L'invocation de Salomon (pp. 105-6) qui précède le 2e cantique est une réécriture de textes bibliques (particulièrement I Rois 8 sur la dédicace du Temple) ; c'est au cours de sa lecture que sont dévoilés (p. 106) le triangle lumineux, le soleil et la lune. 

HYMNE A LA LUMIÈRE. 1

CHOEUR.

Eclatante Lumière,
Tes rayons radieux
Annoncent à la Terre
La puissance des Cieux !

SOLO.

Toi qui nous charme et nous console,
Salut, ô divine clarté !
Rien n'est égal à ta beauté,
Du Ciel, ô brillante auréole !
Tu nous dévoiles notre Dieu...
Nous l'admirons dans son plus bel ouvrage ;
De son amour nous retrouvons le gage
Dans la vive ardeur de ton feu.

CHOEUR.

Eclatante Lumière,
Tes rayons radieux
Annoncent à la Terre
La puissance des Cieux !

INVOCATION A DIEU.

CHOEUR

Etre éternel, Dieu de bonté,
Toi qui remplis l'immense espace !
Nous t'implorons avec humilité :
Sur nous daigne verser ta grâce.

SOLO.

Bénis nos innocens travaux,
Protège nous de ta puissance :
Tu sais que de la bienfaisance
Nous suivons les nobles drapeaux.
Adorateurs de ta sagesse,
Nous cherchons à suivre tes lois ;
De l'amitié nous employons la voix
Pour exhorter notre faiblesse.

CHOEUR.

Etre éternel, Dieu de bonté,
Toi qui remplis l'immense espace !
Nous t'implorons avec humilité ;
Sur nous daigne verser ta grâce.

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