Le Soleil de la Charité

 

Fondée en 1850, la Loge troyenne de l'Union Fraternelle initia la même année un jeune homme qui était déjà une personnalité locale, Louis Ulbach. Il allait bientôt devenir l'Orateur de La Clémente Amitié.

Louis Ulbach (1822-1889) fut un journaliste influent, engagé pour les valeurs démocratiques, et un homme de lettres prolifique. On trouvera plus d'informations à son sujet dans l'article le concernant sur le blog associé au présent site.

Il avait fondé en 1848 à Troyes la revue le Propagateur de l'Aube, qu'il dirigea jusqu'à sa disparition en 1851, moment où il se réinstalla à Paris. En 1858 il sera l'un des fondateurs de la revue le Monde maçonnique.

En 1853, il édite à Troyes, et dédie à ses Frères de Loge, son ouvrage intitulé Philosophie maçonnique, dont un des objectifs est selon lui d'inspirer un sentiment d'estime virile pour une institution sérieuse.

Ce livre, écrit-il, est le commentaire d'un initié de bonne foi sur une association dans laquelle il est entré sans illusion, mais dont il reste membre par une conviction raisonnée, avec une estime réfléchie.

L'ouvrage contient essentiellement des réflexions maçonniques diverses (ce sont forcément celles d'un assez jeune maçon, mais aux âmes bien nées ...), mais aussi les textes de quelques toasts et d'un cantique maçonnique (pp. 169-172), que nous reproduisons ci-dessous.

CANTIQUE MAÇONNIQUE,

 

Chanté au Concert donné par la loge l'Union Fraternelle

 

 

Amis, chantons cette heure solennelle 
Qui dans l'ardeur d'une sainte gaieté 
Fait des rayons dont notre âme étincelle , 
Le soleil de la charité !

I. 

Nos mystères dont on se raille 
Dans ce beau jour sont dévoilés 

         

Et nos secrets sur la muraille 
Brillent aux regards dessillés ! 
Sur les vulgaires calomnies 
Nos mains étroitement unies, 
Semblent agiter un flambeau. 
Reconnaissez, monde profane, 
Dans ces fêtes que l'on condamne, 
La soif du bien, l'amour du beau ! 

Amis, chantons, etc. 

II. 

Cette antique maçonnerie 
Dont les généreux artisans,
Ont le monde entier pour patrie 
Et les malheureux pour enfants ; 
Cet édifice symbolique 
Abrite sous son bleu portique 
Bien des orphelins grelottants, 
Bien des esprits calmes et sages, 
Bien des fronts que de durs voyages 
Ont creusés ou rendus sanglants !

Amis, chantons ....

III.

Sur l'humanité que torture 
Son immortelle ambition, 
Nous répandons l'eau sainte et pure 
D'une immortelle effusion ! 
Nous soutenons l'âme qui doute, 
Et nous aplanissons la route 

Des pieds encor mal affermis ; 
Tout homme en deuil est notre frère, 
Et, priant que Dieu les éclaire, 
Nos ennemis sont nos amis l

Amis, chantons .... 

IV.

Quand nous avons tari des larmes,
Quand nous avons donné du pain, 
Quand la mère n'a plus d'alarmes, 
Quand les enfants n'ont plus de faim ; 
Quand dans les chétives demeures, 
Nous avons allégé les heures 
Qu'alourdissait la pauvreté ; 
Alors, notre tâche est complète ; 
Si nul n'appelle, ou ne regrette, 
Nous reposons en liberté !

Amis, chantons ....

V.

Dans nos plaisirs, dont rien n'altère 
Le flot limpide et souriant, 
Nous appelons une lumière, 
Plus radieuse à l'Orient ! 
Nous invoquons les harmonies, 
Les espérances infinies 
Qui fécondent l'Eternité, 
Et nous jetons au cœur qui souffre, 
Comme des fleurs au fond d'un gouffre, 
Dieu, l'amour et la vérité ! 

Amis, chantons ..... 

        

VI.

Enviez-nous, âmes flétries 
Par une longue inimitié ! 
Venez à nous, âmes meurtries,
Pour qui le monde est sans pitié ! 
Nos soins guériront vos blessures, 
Et nos gaités franches et pures 
Vous adouciront le chemin. 
Aimer ! voilà notre mystère ; 
Dieu le donne avec la lumière : 
C'est le secret du genre humain !

Amis, chantons cette heure solennelle 
Qui dans l'ardeur d'une sainte gaieté 
Fait des rayons dont notre âme étincelle 
Le soleil de la charité !

Le concert au cours duquel fut créé ce cantique a vraisemblablement eu lieu en 1851, avec le concours d'artistes parisiens.

Il n'y a malheureusement aucune indication sur l'air.

On retrouve cette chanson, à l'identique (mais sans nom d'auteur), aux pp. 145-7 du recueil d'Orcel de 1867, sous le titre Le soleil de la charité.

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