Reissiger

En cliquant ici, vous entendrez un extrait de son lied Mit geheimnisvollem Dunkeln, interprété par la soprano Annette Betanski, accompagnée par Susan Miron à la harpe et James Sommerville au cor (CD Chandos CHAN 9843)

 

Formé à Leipzig et ayant ensuite beaucoup voyagé en Europe (notamment à Vienne, Munich, Berlin, Paris et en Italie), Carl Gottlieb Reißiger (1798-1859), pianiste, compositeur, chef d'orchestre et pédagogue, devint une personnalité marquante de la vie musicale à Dresde.

Il est signalé dès 1821 comme membre de la  Loge de Leipzig Balduin zur Linde mais il ne doit pas y avoir été très actif puisqu'il était toujours Apprenti quand, sur la recommandation de Christian Gottfried Körner, il fut agrégé en 1845 à la Loge Zu den Drei Schwertern und Asträa zur grünenden Raute qui le fit aussitôt Compagnon (et Maître un an plus tard).

On trouvera sur ce site son lied maçonnique Schwesternlied.

Une de nos sources pour la présente page est une page du riche dossier consacré par la photothèque de Dresde à l'histoire de la maçonnerie dans cette ville, à l'occasion de l'exposition Brüder reicht die Hand zum Bunde qu'elle avait organisée en 2005.

Fétis en écrit dans son Tome 7 :

REISSIGER (Charles-Théophile), maître de chapelle du roi de Saxe, naquit le 31 janvier 1798, à Belzig, près de Wittenberg. Élève de son père, il se faisait déjà remarquer dès sa dixième année par son habileté sur le piano. En 1811, il eut le bonheur d'être admis comme pensionnaire à l'école Saint-Thomas de Leipsick, où il reçut des leçons de Schicht pour l'harmonie et le piano. Dans les années 1815 et 1816, il écrivit quelques motets qui furent ses premiers essais dans la composition. En 1818, il suivit les cours de l'université de Leipsick, particulièrement pour la théologie, mais sans interrompre ses travaux relatifs à la musique. Un goût passionné l'entraînait vers cet art ; mais pour s'y livrer sans réserve et abandonner la théologie, espoir de son avenir, il était trop pauvre ; son excellent maître Schicht le tira d'embarras, en obtenant par les soins de son gendre, directeur de l'assurance contre l'incendie, et par l'appui de quelques amis de Berlin et de Leipsick, une pension de trois années, qui permit à Reissiger de se rendre à Vienne, en 1821, pour y continuer ses travaux de composition. Il y écrivit son premier opéra : Das Rockenweibchen (La Petite Fileuse), dont la censure ne permit pas la représentation, mais dont l'ouverture, exécutée dans quelques concerts, fit connaître sous un aspect favorable le talent du jeune compositeur. Plusieurs autres ouvertures composées pour le Hofburgtheater lui procurèrent ses entrées aux théâtres impériaux. L'Opéra allemand était alors bien composé ; Reissiger tira quelque fruit de l'audition des bons ouvrages exécutés par d'habiles artistes. Avant de quitter Vienne, il se fit entendre avec beaucoup de succès dans un concert donné au théâtre de la cour : il y chanta un air de basse de Haendel, et exécuta un concerto de piano de sa composition. Artaria et Steiner publièrent alors quelques-uns de ses ouvrages. 

Au mois de mai 1822, Heissiger quitta Vienne, pour se rendre à Munich, dans le but d'y continuer ses études, sous la direction de Winter : il y déploya une activité digne des plus grands éloges. Une messe qu'il acheva dans cette ville, et une ouverture composée sur un thème de cinq notes que lui avait fourni Winter, lui valurent l'amitié de ce maître : le succès de ces œuvres fut si grand, que l'intendant du théâtre royal chargea Reissiger de la composition de l'ouverture, des entr'actes el des chœurs de la tragédie de Néron, qui furent vivement applaudis à la représentation. L'ouverture a été publiée peu de temps après, chez Breitkopf et Haertel, à Leipsick. Après avoir terminé cet ouvrage, le jeune compositeur partit en toute hâte pour cette dernière ville, où l'appelait la maladie de Schicht, son maître et son bienfaiteur. Au mois de mai 1823, il arriva à Berlin, où quelques nobles familles, qui s'étaient cotisées pour assurer son existence, l'accueillirent comme un fils. Avant son départ de Munich, Winter avait fait arranger pour lui le poëme de Didon, opéra de Métastase, dans la forme moderne , mais au moment où il allait le faire représenter, le théâtre de la cour fut réduit en cendres. Reissiger se livra au travail, à Berlin, pour perfectionner son ouvrage, puis il envoya sa partition à Weber, qui fit représenter l'opéra au théâtre royal de Dresde : il y fut joué trois fois avec succès. Les protecteurs de Reissiger obtinrent pour lui du roi de Prusse un subside pour faire un voyage en Italie, et le ministère le chargea de recueillir des notes en France et en Italie concernant l'organisation d'un Conservatoire, qu'on avait le dessein d'établir à Berlin. Reissiger partit de cette ville, au mois de juillet 1824, et prit sa route par la Hollande pour se rendre à Paris, où il arriva au mois d'août. Il y resta jusqu'au mois de février 1825 ; mais le placement de quelques-uns de ses ouvrages chez les éditeurs de musique de cette ville lui permit de suffire aux dépenses qu'il y fit. Dans son voyage en Italie, il visita Turin, Gênes, Milan, Florence, Bologne, Rome et Naples. Après un séjour de quatre semaines dans cette dernière ville, il retourna à Rome, où il fit la connaissance de l'abbé Baini; puis, au mois d'octobre 1825, il retourna à Berlin en visitant Padoue, Venise, le Tyrol et Vienne. Il avait écrit à Rome un opéra intitulé : Der Ahnenschatz (Le Trésor des aïeux), dont l'ouverture brillante eut à Dresde un succès d'enthousiasme ; mais l'opéra lui-même ne fut jamais représenté, parce que le livret avait trop de ressemblance avec celui de Freischùtz. 

A Berlin, Reissiger fut chargé de dresser le plan d'un Conservatoire de musique sur une grande échelle, pour les États prussiens. Ce projet obtint l'approbation d'une commission nommée par le gouvernement ; cependant il n'a pas reçu son exécution. Son auteur fut désigné, dans le même temps, comme professeur de l'Institution musicale dirigée par Zelter. Au mois d'octobre 1826 il fut appelé à La Haye pour y  organiser le Conservatoire qui y subsiste encore. De retour à Berlin, il y reçut sa nomination de directeur de musique à Dresde en remplacement de Marschner, qui venait d'être appelé à Hanovre. Là il dut déployer une activité extraordinaire, car indépendamment de la direction de la musique de l'Opéra allemand, on lui donna aussi celle de l'Opéra italien, pendant une maladie grave de Morlacchi. Les preuves de talent qu'il donna dans ces doubles fonctions lui firent accorder par le roi de Saxe, en 1827, le titre de maître de chapelle, dont la place était devenue vacante par la mort de Weber. Dans cette même année, il écrivit une messe solennelle, et Yelva, mélodrame en trois actes, qui obtint un beau succès dans toute l'Allemagne. Libella, opéra romantique, reçut aussi à Dresde le meilleur accueil, en 1828. Il fut suivi de Die Felsenmühle zu Elalieres (Le Moulin du rocher), qui jouit de la faveur publique à Dresde, à Leipsick, à Berlin, à Breslau, à Copenhague, et dont les journaux ont fait l'éloge. Le Turandot, autre opéra du même auteur, a eu aussi beaucoup de retentissement en Allemagne : toutefois les critiques de ce pays ont considéré le talent du compositeur comme plus remarquable dans la musique religieuse que dans le style dramatique. Dans ces derniers temps il s'est aussi essayé avec succès dans la symphonie. Son nom jouit en Allemagne d'une estime méritée, quoiqu'on ne puisse le classer parmi les compositeurs de génie dont les productions font époque dans l'histoire de l'art.

[Suit une lise (44 items) de ses principales oeuvres]

Une valse ce Reissiger pour le piano a été publiée en France sous le titre de Dernière pensée de Weber, et par cette supercherie a obtenu un succès de vogue ; car pour le peuple moutonnier des amateurs de musique le mérite d'un ouvrage est en raison de la popularité du nom de l'auteur. En dépit des réclamations de l'éditeur qui avait publié depuis longtemps l'œuvre de Reissiger d'où ce morceau est tiré, on ne continuait pas moins à la répandre dans le public sous son faux titre. Reissiger s'en est expliqué lui-même dans une lettre du 7 octobre 1846 à M. Théodore Parmentier, où se trouve ce passage : 

« La dernière pensée de Weber, éditée en Allemagne, et aussi à Paris, peu de temps après la mort du célèbre Weber, vers la fin de 1826, n'est autre chose (ainsi que je l'ai plusieurs fois fait connaître dans les publications musicales du temps) que l'une des valses composées par moi, en 1823, et éditées en 1824, par Peters, à Leipsick, sous le titre de Douze Valses brillantes pour le piano, op. 62. L'éditeur Peters a aussi décliné ce fait, il y a dix ans, dans les papiers publics, et il en est résulté qu'on intitule aujourd'hui la valse en question : Valse de Reissiger, dite Dernière Pensée de Weber. Je ne sais comment il se fait que l'on a utilisé de cette manière l'une de mes valses ; mais il est certain que cela a été une spéculation de marchand de musique, et une véritable fraude. Mon ami Weber m'avait souvent entendu jouer moi-même cette valse, en 1813, à Leipsick; je sais aussi qu'elle lui plaisait beaucoup et qu'il la jouait souvent. Je ne sais s'il l'a jouée à Paris, mais cela est probable. »

Reissiger était membre d'un grand nombre de sociétés musicales, et avait reçu de plusieurs rois et princes des témoignages de distinction. Il avait de l'instruction littéraire et scientifique. On a de lui quelques bons articles de critique musicale dans la Gazette générale de musique de Leipsick et dans des journaux de Dresde. Chef d'orchestre distingué, il a été appelé à diriger de grandes fêtes musicales à Aix-la-Cliapelle en 1843, et à Meissen en 1844. Ce digne artiste, aussi intelligent que laborieux, et dont le caractère bienveillant ne connaissait ni l'envie ni l'intrigue, est mort à Dresde, le 7 novembre 1859, à l'âge de soixante et un ans.

 

Retour à la table chronologique :

Retour à la table alphabétique :