Premier chant funèbre pour Louis XVIII

Ce cantique est le premier des deux chantés lors de la pompe funèbre organisée le 25 novembre 1824 par le Grand Orient de France en l'honneur de Louis XVIII. 

Le texte est, comme pour le second, du Frère Bouilly et la musique du Frère Chenié.

Nous n'avons pu décoder toutes les références contenues dans le texte, mais attirons l'attention sur le couplet suivant, très significatif (Pierre Chevallier le cite d'ailleurs, p. 119, dans le Tome II de son Histoire de la Franc-maçonnerie française, Fayard, 1974) :

Un monarque ici n'est qu'un Frère ;
Ici, tout disparaît, grandeurs, noms, qualités ;
Mais tout Maçon pleure et révère
L'homme-roi dont la main traça nos libertés.

Le dernier vers fait vraisemblablement allusion à la Charte de 1814, dont le non-respect par Charles X allait entraîner la révolution de 1830.

On remarquera la parenté d'esprit entre les deux premiers vers et ceux chantés en 1865 lors du décès d'un autre roi, Léopold Ier de Belgique : 

… Celui dont notre règle austère
Plaça l’homme et le Roi sous le même niveau.
Oui, le Roi-Franc-Maçon passa sous le niveau.

C'est sans doute sa situation d'exilé qui le fait comparer à Aristide et sa survivance à son frère Louis XVI à Nestor.

On remarquera aussi la réutilisation, dans le Choeur final, d'un vers classique (recopié du dernier couplet du Chant des Apprentis), Tenons-nous ferme ensemble

CHANT FUNEBRE

DU Frère BOUILLY, OFFICIER DU GRAND ORIENT,

Musique du Frère CHÉNIÉ.

 

RÉCITATIF.

Quel douloureux silence ! et quel deuil environne
L'éclat de l'Orient ! Quels sinistres apprêts !
L'acacia, mêlé parmi de noirs cyprès,
Dérobe à nos regards un sceptre, une couronne ;
La voûte du Temple résonne
De longs gémissemens et d'éternels regrets.

 

CHANT.

Celui qui du peuple est le père,
Des grands et des petits a droit d'être pleuré :
Pleurons, avec la France entière,
Le roi qu'elle nomma Louis-le-Désiré !

Un monarque ici n'est qu'un Frère ;
Ici, tout disparaît, grandeurs, noms, qualités ;
Mais tout Maçon pleure et révère
L'homme-roi dont la main traça nos libertés.

« Cessez vos guerres intestines, »
Disait-il en rentrant sur le sol des Français ;
« Secondez-moi : de nos ruines
» S'élèvera bientôt le temple de la Paix. »

« Vous, fiers enfans de la Victoire, »
Répétait-il souvent à nos anciens guerriers,
« Suivez ANTOINE au sentier de la gloire,
» Et vous pourrez encore moissonner des lauriers. »

Qui mieux que lui soutint l'empire
Des lettres et des arts ? A sa brillante cour,
Le ciseau, les pinceaux, la lyre,
Semblaient, avec son nom, s'embellir chaque jour.

Exilé loin de sa patrie,
Il rappela souvent Aristide et Nestor ;
Mais s'il fut grand toute sa vie,
A ses derniers momens il fut plus grand encor.

 

CHOEUR.

De nos bras enlacés, Frères, formons la chaîne ;
Tenons-nous ferme ensemble autour de ce tombeau,
Et que chacun de nous y dépose un rameau,
Gage de notre amour, signe de notre peine !...
Dieu, reçois le roi des Français
Couvert des pleurs de ses sujets !
Ah ! si du vrai mérite et de la bienfaisance
Le bonheur éternel devient la récompense,
Louis doit reposer en paix.
Juste ciel, au roi des Français,
Accorde une éternelle paix ! 

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