Les Pierres Maçonniques

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A:. L:. G:. D:. G:. A:. D:. L'U:.

Fête du Solstice d'Hiver,

Célébrée dans la R :. L :. de St. Jean, sous le Titre distinctif de la Réunion des Amis du Nord, à l' O:. de Bruges, le 27e. jour du 10e. mois de l'an de la V:. L:. 5818.

LES PIERRES MAÇONNIQUES.

CANTIQUE

Chanté au Banquet de la Fête, par l'Auteur le F :. DEBEAUNE (L. J.) M :., Orateur-Secrétaire-Adjoint de ce R:. Atel:.

Air : du Corbillard, etc.

L'air désigné ici comme air du Corbillard est sans doute (d'autant que la métrique correspond) l'air (dont le texte est d'Armand Gouffé) Que j'aime à voir un corbillard, que la Clé du Caveau identifie ici à l'air du pas redoublé.

En tout pays, à chaque instant,
On travaille la pierre :
Il serait donc très important 
De traiter la matière.
En attendant qu'un connaisseur 
En fasse son affaire, 
Je vais tracer en amateur, 
Quelques mots sur la pierre.

Fils d'Apollon, à tes accens 
La pierre fut sensible!
Inspire moi, prête à mes chants
Ce charme irrésistible.
Ne crois pas que je sois jaloux 
De ta gloire immortelle, 
Heureux si je puis des cailloux
Tirer une étincelle !

Un Néophite un peu malin 
Est bientôt lapidaire.
Il peut apprendre en son chemin 
A bien tailler la pierre.
D'abord ses pas sont incertains,
En tremblant il maçonne ;
Mais la pierre brute en ses mains
Par dégré se façonne.

 

Laissons au profane marchand 
Rubis et Cornalines.
Pourquoi courir à l'Indostan 
Chercher des pierres fines ?
Il en est dans nos Orients 
Qui sont plus radieuses :
Nos frères sont nos diamants,
Nos pierres précieuses.

Dans l'Orateur nous voyons tous
Un saphir magnifique ;
Il répand l'éclat le plus doux.
Et le plus maçonnique.
Je vois dans chaque Surveillant.
Un bijou nécessaire.
Le Vénérable est un brillant
D'où jaillit la Lumière.

Vouloir transmuer tout en or 
Est un vœu chimérique :
On peut trouver un vrai trésor 
Sans un rêve alchimique.
Si vous préférez aux métaux 
Une saine morale, 
Nommez ce remède à tous maux 
Pierre philosophale.

 

Cœurs inhumains, ambitieux,
Vous que l'intérêt guide
Ne profanez jamais ces lieux,
La sagesse y préside.
Ici point de fausse pitié
Et point d'humeur farouche ;
Bonté, Confiance, Amitiés, 
Sont nos pierres de touche.

Vous qui trahissez vos sermens
Evitez cet asile,
Des maçonniques sentiments
L'honneur est le mobile.
Sur la pierre un serment trompeur
Avec le tems s'efface ;
Un Maçon le grave en son cœur
Pour en garder la trace.

On vit parfois au Vatican
Etinceler la foudre ;
C'est vainement que ce volcan
Veut nous réduire en poudre.
Nous savons sans nous diviser
Parer un trait mystique ;
De lui-même il vient se briser
Sur la pierre cubique
.

 

Qui voit de près nos batimens
Les trouve exempts de vices ;
Les vertus sont les fondemens
De tous nos édifices.
La bienfaisance est l'ornement
Du plus beau sanctuaire,
Et la raison, du monument
Est la pierre angulaire.

J'ignore si Gentil Bernard
Avait vu la Lumière ;
D'aimer il nous enseigna l'art,
C'est l'ouvrage d'un frère.
Ce bon Chrétien plus que Gentil,
Ennemi de la Guerre,
Voyait dans la pierre-à-fusil
Une infernale pierre.

Architecte de l'Univers !
Admirant tes ouvrages,
Aux maçonnes j'offre en mes vers
Le plus pur des hommages ;
A nos yeux ce sexe charmant
Est ta vivante image ;
C'est pour nous la pierre d'aimant ;
La chérir est d'un sage.

 

Après de pénibles travaux,
* (Six lustres de tourmente,)
Solide paix et long repos
Sont nos pierres d'attente ;
Mais nos Princes, Maçons parfaits,
Veulent servir d'exemples !
C'est au bonheur de leurs sujets
Qu'ils construisent des Temples.

De la pierre d'achoppement
Les coups sont mortifères ;
Aussi je la crains franchement
En amour, en affaires.
Si j'ai de bien faibles talens,
Du moins je suis sincère,
Et vous êtes trop indulgens
Pour me jetter la pierre.

DE L'IMPRIMERIE DE
 E. J. TERLINCK, A BRUGES

On trouve le même texte dans une publication profane, le quotidien gantois Le Véridique, à la p. 2 du n° du 17 janvier 1819 (soit 3 semaines seulement après la fête), introduit par le texte suivant :

Un homme aimable, dont les poésies légères attestent l'heureuse facilité, nous a fait l'amitié de nous adresser les couplets suivans. Nous nous en emparons comme d'une bonne fortune pour nos lecteurs. Ceux qui les connaissent nous vaudraient des reproches de la part de ceux qui les ignorent, si nous les privions du plaisir de les lire. Il n'est pas nécessaire d'être maçon pour en apprécier le mérite.

On le retrouve également à la p. 168 des Mélanges de philosophie, d'histoire et de littérature maçonnique.

Un brin d'histoire

Six lustres de tourmente : à l'endroit marqué (ci-dessus) * dans son texte, l'auteur fait manifestement allusion à la période troublée qui a suivi la Révolution Française, période pendant laquelle la future Belgique fut à plusieurs reprises, comme souvent, le champ de bataille de l'Europe : "A partir de 1789, la Belgique connut des temps troublés et les loges cessèrent presque totalement leurs travaux" (1), les activités maçonniques ne reprenant qu'à l'époque du Directoire, pour se développer sous l'égide du Grand Orient de France jusqu'à la chute de l'Empire. Quelques dates :

  • 1789 : révolte contre l'empereur Joseph II

  • 1790 : proclamation des Etats belgiques unis

  • 1795 : annexion à la France

  • 1815 : bataille de Waterloo -  fin de l'Empire - rattachement par le Congrès de Vienne des provinces belges à la couronne hollandaise.

Il y avait, en 1815, 27 loges en Belgique. Le roi Guillaume sut s'assurer leur loyalisme.

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