A la bienfaisance

Cette chanson apparaît pour la première fois à notre connaissance à la p. 268 de la Muse maçonne de 1806 (l'image ci-dessous est celle-là). Et, la même année, on en retrouve les deux premiers couplets dans le recueil d'Eleusine (p. 63). Aucun nom d'auteur n'y est mentionné.

Nous avons cependant pu en découvrir l'origine : il s'agit des strophes 2, 4 et 5 du poème Ode à la Bienfaisance de Jacques Delille, oeuvre qui figure dans ses Poésies fugitives (éditées en 1802) mais qui selon Sainte-Beuve date de 1758 environ.

Delille fut membre des Neuf Soeurs.

Mais ces beaux arts si doux, si brillants, si sublimes,
Ont-ils seuls notre amour ? Non, le Pinde a deux cimes :
Sur l'une, les neuf sœurs animent le ciseau,
La lyre harmonieuse et le savant pinceau
Inspirent le poète et conduisent la danse ;
Les trois Grâces en chœur y sautent en cadence.
Sur l'autre, est dans leurs mains le tube observateur,
Le prisme des rayons heureux distributeur,
Le cercle, le cadran, le compas et l'équerre,
Qui divisent le ciel et mesurent la terre.

(Delille, l'Imagination, Chant V, p. 43)      

 ci-contre : portrait de Delille paru dans Le Globe

On notera la référence, fréquente dans le chansonnier maçonnique du XVIIIe, aux beaux jours d'Astrée.

Aucun air n'est mentionné ni dans l'une ni dans l'autre des éditions citées.

A la Bienfaisance

 

Bienfaisance, o vertu sacrée !
Noble attribut des immortels,
Pour toi l'homme aux beaux jours d'Astrée
Eleva les premiers autels.
Dans ce soleil dont l'influence
De nos fruits mûrit la semence
C'est toi que l'homme révéroit :
Dans tous les globes de lumière
Qui suivent pour nous leur carrière
C'est toi seul qu'il adoroit.

 

La nature prudente et sage
Unit tous les hommes entr'eux ;
Ta main confirmant son ouvrage
Resserre ces utiles nœuds.
C'est toi dont le charme nous lie
A nos maîtres, à la patrie,
Aux auteurs même de nos jours ;
C'est toi dont la vertu féconde
Réunit l'un et l'autre monde
Par un commerce de secours.

 

Des fortunes, à ta présence
Disparoît l'inégalité !
Par toi les biens de l'opulence
Sont les biens de la pauvreté.
Sans toi la puissance suprême
Et la pompe et le diadème,
Brillent d'un éclat odieux ;
Sans toi sur ce globe où nous sommes
Les rois sont les tyrans des hommes,
Ils sont par toi rivaux des dieux.

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