La Saint-Jean d'Hiver 1805 au Grand Orient

 

Ce document (notice n° FRBNF38773066) figure au catalogue de la BNF comme un des items (qui devrait porter le n° 4) de la cote FM IMPR-2634.

Il est imprimé sur les 3 premières pages d'un feuillet de 4. Il illustre la partie musicale de l'édition 1805 de cette manifestation traditionnelle, célébrée cette année-là le 28 décembre.

Deux motifs de gloriole y sont mis en valeur : l'Union des Rits et les Triomphes de la Grande Armée.

On sait que c'est sous la pression de Napoléon, soucieux d'unifier la maçonnerie française pour mieux la contrôler, que le concordat entre le Grand Orient et la Grande Loge Générale Ecossaise tout récemment créée avait été négocié et accepté malgré, de part et d'autre, des réticences qui n'attendaient qu'une occasion pour s'exprimer (ce qui ne tarda pas). Le texte qui se glorifie de cette Union des Rits fait mine (Le Schisme a fui ; tous les Rits sont français) d'ignorer ces réticences, qui s'étaient pourtant déjà traduites, le 6 septembre 1805, par la dénonciation du concordat.

Les derniers mois de 1805 ont été triomphaux pour l'armée napoléonienne rebaptisée Grande Armée, et couronnés par la prise de Vienne le 14 novembre et la victoire d'Austerlitz le 2 décembre (un an jour pour jour après le sacre à Notre-Dame), ce qui permit d'imposer à l'Autriche le traité de Presbourg, signé le 26 décembre. L'occasion est donc bienvenue pour déployer envers le Dieu de la Patrie les hyperboliques témoignages de culte de la personnalité traditionnellement proclamés dans les festivités maçonniques. 

On voit aux derniers vers que l'espoir d'envahir l'Angleterre, espoir mis en veilleuse par la constitution, à l'instigation de l'Angleterre qui l'avait financée, de la troisième coalition, était toujours vivace malgré la catastrophe de Trafalgar le 21 octobre, laquelle n'avait manifestement pas entamé la certitude arrogante d'une proche victoire ni mis une sourdine aux habituelles rodomontades à ce sujet.

Nous n'avons trouvé aucune trace du compositeur Carbonnier.

L'auteur des paroles, le Frère Brunet, Officier du Grand Orient, est dans doute Antoine Brunet, dont l'ouvrage de Pierre Mollier et Pierre-François Pinaud, L'état-major maçonnique de Napoléon (Ed. A L'Orient, 2009), nous apprend qu'il fut banquier, secrétaire de la Chambre de Commerce de Paris, membre du Centre des Amis, et second Surveillant de la Grande Loge Symbolique du G. O. depuis 1804.

         

       

 

 

 

 

ÉPODE LYRIQUE

EXÉCUTÉE au Grand Orient de France, présidé par les Sérénissimes GRANDS MAITRES, à la Fête de Saint-Jean, le 28.e jour du 10.e mois de l'an de la Vraie Lumière 5805,

commémorative

De l'Union des Rits et des Triomphes de la Grande Armée.

 

Paroles du Frère Brunet, Officier du Grand Orient

Musique du Frère CARBONNIER.

 

Trio et Choeur.

Quel jour nouveau brille et m'éclaire?
Quel Orient majestueux !
Jamais l’astre de la lumière
N'étincela de plus de feux.

 

Air.

Sous un ciel épuré de son dernier nuage,
Je vois planer l’auguste Roi des airs :
Rejoint à ses enfans, que dispersa l’orage,
Le Pélican guérit les maux qu’ils ont soufferts.

Récitatif.

une voix.

Frères, nés pour s'aimer, Maçons d'un même ouvrage,
Réunis pour jamais, redoublons de courage.

seconde voix.

Devant l’œil du Héros qui commande à la paix,
Le Schisme a fui ; tous les Rits sont français.

 

Duo.

L'Acacia refleurit avec gloire ;
Des Magistrats, modèles pour l’histoire,
A ses rameaux attachent l’olivier;
Des favoris de la Victoire
L'entrelacent au vert laurier.

(Bruit de Guerre.)

 

Récitatif.

Mais la foudre gronde
Et la paix du Monde
Doit coûter encor des combats !
Maçons, redevenez Soldats.

 

Air.

Veillez sur la vie
Du Dieu de la Patrie ;
Conservez-le pour les travaux
D'un demi-siècle de repos.
Et toi, dont la gloire
Marque tous les pas,
Laisse un jour reposer l’histoire,
Ou l’avenir n'y croira pas.

 

Choeur Général.

O jour heureux ! il suspend son tonnerre ;
Les Rois vaincus obtiennent leur pardon ;
Le Nord va dire, en célébrant son nom :
Il fut l’effroi, c'est l’amour de la Terre.
Vois ce qu'ont fait l’or et la trahison ?
Te voilà seul, orgueilleux insulaire !
Prolonges-tu ta lutte téméraire ?
Tremble.... Les Dieux portent Napoléon.
Cède ; ou bientôt ce noble cri de guerre
Va retentir jusqu’au sein d’Albion :
Vive Napoléon! ! ! !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DE L'IMPRIMERIE DU GRAND ORIENT DE FRANCE, AU LOCAL DU CHATELET.

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