La famille SALLANTIN

Il n'existe à notre connaissance d'enregistrement d'aucun des Sallantin 

 

Il n'est pas évident d'identifier avec précision, dans la grande famille musicienne des Sallantin, ceux qui furent maçons. 

Le Bihan, dans son ouvrage  Francs-maçons parisiens du Grand Orient de France, en donne deux :

Selon le livre de Louis Amiable, Une loge maçonnique d'avant 1789, la loge des Neuf Soeurs (Paris, EDIMAF, 1989, avec commentaire et notes critiques de Charles Porset), il s'agissait de deux frères.
 

Dans la planche à tracer de la respectable loge des Neuf-Sœurs pour la Tenue de l’initiation de Voltaire (reproduite notamment par Gustave Desnoiresterres dans le Tome VIII de Voltaire et la société au XVIIIe siècle, Didier, 1867), on peut d'ailleurs lire que :

… l’instant où il venait de prêter l’obligation a été annoncé par les frères des colonnes d’Euterpe, de Terpsichore et d’Erato, qui ont exécuté le premier morceau de la troisième symphonie à grand orchestre de Guenin. Le frère Caperon menait l’orchestre; le frère Chic, premier violon de l’électeur de Mayence, était à la tête des seconds violons; les frères Salantin, Caravoglio, Olivet, Balza, Lurschmidt, etc., se sont empressés d’exprimer l’allégresse générale de la loge en déployant leurs talents si connus dans le public, et particulièrement dans la respectable loge des Neuf-Soeurs.

Nous avons trouvé dans une étude très fouillée, parue dans les n°s 29 et 30 de la revue Généalogie en Yvelines du Cercle généalogique de Versailles et des Yvelines, le tableau généalogique suivant :

Il ne semble pas invraisemblable que le Louis François Sallantin de Dourdan (violoniste, mais dont rien n'indique jusqu'à présent qu'il ait également été compositeur) figurant à ce tableau (n° 6) soit bien le deuxième mentionné par Le Bihan sous le nom Sallentin-Dourdan

Fétis pour sa part ne consacre une entrée de sa Biographie universelle des musiciens qu'au plus célèbre des Sallantin, Antoine, hautboïste, né en 1754, dont il dit qu'il fut désigné successivement comme Sallantin le neveu (pour le distinguer de son ou ses oncles) et (pour le distinguer cette fois de son frère) Sallantin l'aîné, et qu'il était à la fois :

Ces renseignements sont totalement contradictoires avec ceux du tableau généalogique ci-dessus - qui ne contient d'ailleurs aucun Antoine -, mais on sait que Fétis n'en était pas à une erreur près ...

Peut-on, malgré la différence de prénom, et la différence d'un an dans la date de naissance, identifier l'Antoine Sallantin mentionné par Fétis et le Bihan avec le François-Alexandre figurant (n° 5) à la généalogie ci-dessus ? C'est en tout cas l'option prise par l'auteur de celle-ci (Joseph Bonnet), et elle nous semble vraisemblable. D'autant qu'il arrivait semble-t-il régulièrement à l'époque que, pour se distinguer d'un père ou d'un oncle portant le(s) même(s) prénom(s) aux registres de baptême, on s'en choisisse un autre pour se faire connaître dans le monde.
 

Selon les biographies (presque identiques) données par Fétis et par Bonnet pour respectivement Antoine et François-Alexandre (ci-contre) Sallantin, celui-ci (1755-? : sa date de décès est incertaine - Wikipedia donne 1830, une autre source 1816) devint dès l'âge de 18 ans premier hautbois à l'Opéra et fut formé par le célèbre Fischer, auprès duquel il se trouvait quand les événements de la Révolution l'empêchèrent, jusqu'en 1793, de rentrer en France. Il reprit alors ses fonctions et participa en 1794-5 aux Concerts Feydeau. Il fut également professeur au Conservatoire. 

Son oeuvre est restée manuscrite, à l'exception d'un concerto pour flûte édité par Pleyel en 1797.

Comme on le voit plus haut, il fut membre de nombreuses Loges. Il est également noté comme membre de la Société musicale (considérée comme para-maçonnique) Les Enfants d'Apollon en 1785 et 1806.

 

Le Frère Salentin, de l'Académie royale de musique, est mentionné (sans prénom) comme le premier hautbois de l'orchestre de la Société Olympique à la p. 59 de la liste des membres pour 1786.

D'autres Sallantin maçons ?

Le fondateur des Enfants d'Apollon

Alors que musicologues et maçonnologues se sont abondamment penchés sur certaines des Sociétés de concert maçonniques ou paramaçonniques au XVIIIe siècle, telles que le Concert Spirituel, le Concert des amateurs ou la Société Olympique, les chercheurs semblent avoir moins exploité - du moins à notre connaissance - la documentation existant sur Les Enfants d'Apollon, qui semble être une Société du même type.

Elle fut fondée en 1741 et semble avoir compris environ une moitié de musiciens. Quoiqu'elle soit généralement considérée comme para-maçonnique, nous ne sommes pas certains que dans cette première époque elle ait été exclusivement réservée aux maçons. Elle semble avoir disparu peu après la Révolution (en 1788, on y créa encore Apollon chez Admète et en 1789 Céyx et Alcyone, de Renou) et avoir été ressuscitée vers 1806. La présence dans ses effectifs, pendant cette seconde période, de célébrités (le compositeur Auber par exemple) qui ne sont jamais citées comme maçons semble indiquer qu'elle a progressivement perdu son éventuel caractère maçonnique.

Parmi ses membres, on peut citer Grétry, Cherubini et Charles-Valentin Alkan (1813-1888). Haydn en fut fait membre en 1807.

ci-dessous : médaille (1807) de la Société (avec la date de création, 1741) - images empruntées au très riche site Médailles napoléoniennes. La devise latine (empruntée à Ovide qui, dans Les Pontiques, qualifie ainsi l'étude des arts) qui y figure signifie Il adoucit les moeurs et en prévient la rudesse.

 L'article de Joseph Bonnet cité plus haut nous apprend que le grand-père des précédents, Alexandre Salantin (1695-1765), violiste et violoncelliste (n° 2 du tableau généalogique ci-dessus), fut un des fondateurs, et le premier président, des Enfants d'Apollon. L'article reproduit son éloge funèbre, qui semble confirmer le caractère fraternel de la Société : 

Si les devoirs de l'amitié nous engagent à répandre des fleurs sur le tombeau de nos frères, ces larges fleurs sont toujours arrosées de larmes. 

Nous ne pourrons retracer leurs vertus et le tendre attachement qui nous unissent à eux sans rapporter le souvenir cher d'un frère que nous regretterons toujours, Alexandre SALLANTIN ...

Alexandre SALLANTIN a été fondateur de notre Compagnie, il en a été le premier chef... Par son aménité et sa sagesse, Alexandre SALLANTIN a su maintenir et affermir les règlements de notre académie, qui font aujourd’hui notre commune félicité ... 

La culture de talents n'a pas été un obstacle à l'éducation de sa famille. Il a su lui inspirer ces sentiments d'honneur et de probité (cfr. note 1) qui la rendaient si estimable ...

Le frère Sallantin a laissé quatre enfants ... L'un d'eux est attaché à notre compagnie par les liens de la fraternité ...

NB : celui-ci est François-Alexandre (1726-1788, n° 4 du tableau généalogique), qui présidait à ce moment à son tour la Société, et qui fut membre du Concert Spirituel.

note 1 : nous avons mis en exergue cette expression, qui rappelle le texte ci-dessous, figurant en tête des Constitutions d'Anderson :

... quoique dans les temps anciens les Maçons fussent astreints dans chaque pays d'appartenir à la religion de ce pays ou de cette nation, quelle qu'elle fût, il est cependant considéré maintenant comme plus expédient de les soumettre seulement à cette religion que tous les hommes acceptent, laissant à chacun son opinion particulière, et qui consiste à être des hommes bons et loyaux ou hommes d'honneur et de probité, quelles que soient les dénominations ou croyances qui puissent les distinguer; ainsi, la Maçonnerie devient le centre d'union et le moyen de nouer une véritable amitié parmi des personnes qui eussent dû demeurer perpétuellement éloignées.

(... though in ancient times Masons were charged in every country to be of the religion of that country or nation, whatever it was, yet 'tis now thought more expedient only to oblige them to that religion in which all men agree, leaving their particular Opinions to themselves: that is, to be good men and true or Men of Honour and Honesty, by whatever Denominations or Persuasions they may be distinguished; whereby Masonry becomes the Centre of Union and the Means of conciliating true Friendship among Persons that must have remained at a perpetual Distance.)

Retour à la table chronologique:

Retour à la table alphabétique: