Cantate d'inauguration

 En cliquant ici (midi) ou ici (MP3), vous entendrez l'air 716 de la Clé du Caveau

Cette Cantate pour l'Inauguration du Temple du Grand Orient fut chantée le 23 mars 1859 dans la Loge de Jérusalem des Vallées Egyptiennes.

Après que l'Obédience ait multiplié des essais infructueux en vue d'une installation immobilière stable, un des premiers actes du nouveau Grand Maître, le Prince Murat, après son installation en février 1852, fut l'acquisition de l'immeuble du 16 rue Cadet, qui fut inauguré à mi-1853 (et qui est encore actuellement son siège). De nombreux travaux d'aménagement durent y être effectués.

Mais la charge financière résultant de cet achat était si lourde qu'il fut nécessaire d'en sous-louer une partie, pour une utilisation qui n'allait pas manquer de faire scandale.

Rebold évoque en effet en 1862 les vœux presque unanimes des maçons qui désirent la vente d'une propriété, où, dans l'enceinte même des murs qui composent l'hôtel du Gr. Orient, et par une spéculation peu digne d'elle, la dernière administration a permis d'élever un établissement dont le voisinage est à la fois un trouble et une honte pour les travaux maçonniques. Ce qu'il explicite en mentionnant l'établissement d'un temple consacré à Vénus dans les murs mêmes de celui des francs-maçons. Pierre Chevallier, dans son Histoire de la Franc-maçonnerie française (Fayard, 1974), Tome II, p. 376, commente ainsi ce fait : Peut-on dire de façon plus euphémique que l'exclusion des personnes du sexe des Loges ne s'étendait pas à celles qui dans la partie ainsi louée de l'hôtel du Grand Orient travaillaient à l'amortissement des dettes contractées ...

Nous ignorons quelle est la circonstance particulière - sans doute l'inauguration d'un des Temples qui devenaient disponibles au fur et à mesure de l'avancement des travaux - qui fut l'occasion de cette cantate.

L'auteur donne au passage un coup d'encensoir au Grand Maître Murat (qui était précisément fort critiqué pour cette acquisition) dont la Jérusalem des Vallées Egyptiennes, et surtout Boubée qui en fut le Vénérable d'honneur ad vitam, faisaient partie des soutiens les plus fidèles.

Le ton du cantique, qui est très solennel et conventionnel, est aussi particulièrement religieux. Rappelons que la Constitution du Grand Orient de 1849 avait (pour la première fois) imposé l'obligation de la croyance en l'existence de Dieu et en l'immortalité de l'âme. C'est seulement lors de la révision de 1865 que, d'une manière un peu contradictoire, fut ajouté à cet article l'alinéa suivant : Elle [la Franc-Maçonnerie] regarde la liberté de conscience comme un droit propre à chaque homme et n'exclut personne pour ses croyances. L'époque est donc celle d'une lutte d'influence, au sein de l'Obédience, entre une aile progressiste et une aile conservatrice, dont Boubée (dont on peut sans doute reconnaître ici le style) était un des porte-drapeaux.

Voir ici l'air de la Sentinelle

       

        

Cantate

 

pour l'Inauguration du Temple maçonnique du Grand Orient de France

chantée le 23 mars 1859 

dans la Respectable Loge 

Jérusalem des Vallées Egyptiennes

 

 

 

Air : de la Sentinelle.

 

1

Peuple maçon, lève un front radieux ! 
Que de tes chants ces voûtes retentissent ! 
Et que les sons les plus mélodieux 
Aux harpes d'or dans ce temple s'unissent. 

Asile d'amour et de paix 
Bâti par une main chérie (1), 
D'un monde faux bravant les traits. 
Sois désormais 
Et pour jamals 
Notre patrie ! (bis

(1) C'est le Prince Lucien Murat, Grand Maître de l'Ordre maçonnique en France, qui a fait exécuter les travaux de ce beau Temple, malgré les nombreux obstacles qui semblaient s'y opposer. 

 

 

2

Comme autrefois les enfants d'!sraël
Par l'arche sainte obtinrent la victoire, 
Tel aujourd'hui, par ce temple immortel. 
L'œuvre mystique inaugure sa gloire.

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

3

Plus rapproché de la voûte des cieux, 
Ce temple auguste, au-dessus des nuages, 
Sous un soleil constamment radieux, 
Voit à ses pieds la foudre et les orages.

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

4

Là-bas les fers, ici la liberté ; 
Nous ne formons qu'une même famille : 
Et qui sait mieux servir l'humanité, 
Celui-là seul parmi ses frères brille.

Asile d'amour et de paix, etc.

 

 

5

Loin, loin d'ici, trompeuse vanité, 
Qui sous l'éclat de hochets chimériques 
Crois étouffer la sainte égalité, 
Ce diamant des vertus maçonniques !

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

6

Maçon, qui sais mesurer la hauteur 
De ce soleil, comme de cette terre, 
Peux-tu douter que leur dlvin auteur 
N'ait pris en main le compas et l'équerre ?

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

7. 

Que l'homme donc se livre à ses penchants, 
Son âme rentre aux cieux dont elle est née ; 
Or, un dieu juste aux bons comme aux méchants, 
Peut-il garder la même destinée? 

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

8

Frères ! soumis aux décrets des destins, 
Puisqu'il nous faut quitter cette planète, 
Plus près de Dieu que les autres humains, 
Méritons-en une autre plus parfaite. 

Asile d'amour et de paix, etc. 

 

 

9.

En attendant, puisque dans ce sèjour, 
Par sa bonté l'Éternel nous rassemble, 
Tournons vers lui, guidés par notre amour, 
Nos cœurs, nos voix, et répétons ensemble :

Asile d'amour et de paix, etc. 

ci-contre :

à gauche, l'ancienne entrée du bâtiment de la rue Cadet (photo empruntée à une page du site Terres d'écrivains)

à droite : la façade actuelle (photo empruntée à une page du sympathique site photographique Parisdailyphoto)

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