Fait's-vous maçon

Nous ne disposons pas encore de fichier midi pour cette partition, et serions particulièrement reconnaissant à qui pourrait en établir un.

Nous connaissons une édition (sans indication d'auteur) de ce cantique dans un recueil (sans date) intitulé Bluettes maçonniques (qu'il ne faut pas confondre avec celui de Delorme portant le même titre). Il y figure aux pp. 27-28.

Mais une autre édition nous permet d'en connaître l'auteur : Rougemont le fait en effet figurer (pp. 109-12, reproduites ci-dessous) dans son recueil de Chansons et poésies en 1822 (ce recueil est profane : dans sa préface, Rougemont précise sur ses chansons que la plupart ont été faites pour les réunions du caveau moderne ; mais pour ce cantique-ci, il spécifie qu'il fut chanté à la Loge des Cœurs unis).

Il traduit une conception de la maçonnerie bien plus épicurienne et festive que philosophique, conformément à la pratique qui semble avoir été largement majoritaire en France à l'époque. 

Rougemont fait ainsi à la maçonnerie une publicité qui (mise à part la philanthropie, celle-ci étant vraiment la seule norme de la maçonnerie du XVIIIe qui ait été sauvegardée par la maçonnerie impériale) conviendrait tout aussi bien à des sociétés profanes, chantantes et bachiques telles que la Société du Caveau ...

Dans les Bluettes (qui, elles, ne précisent pas de lieu), au lieu de C'est V.... qui nous préside, on peut lire C'est Marchand qui nous préside. Il s'agit donc sans doute ici encore d'une des innombrables chansons en l'honneur du célèbre Hippolyte Merché-Marchand, même si celui-ci est connu comme le Vénérable de la Parfaite Réunion (dont Rougemont était membre) plutôt que des Cœurs unis.

Piron, cité au premier couplet en compagnie d'Epicure, est un poète libertin et satirique.

Chaulieu, cité au 4e couplet avec Scarron, est un poète libertin.

On remarque que, d'une manière qui ne deviendra péjorative que plus tard, la maçonnerie est ici qualifiée de secte.

Bon, bon, saint Léobon semble, d'après cette page de la Clé du Caveau, être le refrain du Branle limousin, que ce recueil donne sous le n° 1081.

On remarque dans chaque couplet (comme dans le Branle limousin, dont la métrique est similaire) 6 rimes en on et deux rimes féminines.


  
      

          

FAIT'S-VOUS MAÇON

 

CANTIQUE

 

Chanté à la Loge des Cœurs unis.

 

Air : Bon, bon, saint Léobon.

 

Vous qui cherchez l'union,
Vous, que le plaisir enflamme,
Vrais sages à la façon
D'Épicure et de Piron,
Bon, bon, arrivez donc ,
Notre secte vous réclame ;
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Vous qui baissez pavillon .
Devant le train de Madame, 
Pour éviter l'carillon 
Qu'elle fait à la maison, 
Bon, bon, arrivez donc,
Chez nous on n' voit pas de femme,
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Vous, dont le cœur noble et bon,
Pratique la bienfaisance,
Et dans un secret profond
Cache une bonne action,
Bon, bon, arrivez donc,
Nous obligeons en silence,
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Vous qui, comm' Chaulieu, Scarron,
Joignant l' précepte à l'exemple,
Prêchez dans chaque sermon
Plaisir, folie et raison,
Bon, bon, arrivez donc,
Venez prêcher dans ce temple,
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Vous qui riant du blason,
Traitez les rangs de chimères,
Et r'cevez, riches ou non,
Les brav's gens à l'unisson,
Bon, bon, arrivez donc,
Ici nous sommes tous frères
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Nombreux enfans d'Apollon,
Vous qu'un sifflet estomaque ,
Et qui n'aimez que le son
Des claqueurs de profession,
Bon, bon, arrivez donc,
Chez nous sans cesse l'on claque,
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Vous qu'un r'pas solide et long,
Pris gaîment, partout arrange,
Pourvu que le vin soit bon,
Les convives sans façon,
Bon, bon, arrivez donc,
Chez nous l'on rit et l'on mange;
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

 

  
Au banquet de Salomon
La sagesse est notre égide,
L'amitié notre échanson,
Notre dessert la chanson :
Bon, bon, arrivez donc, 
C'est V.... qui nous préside,
Bon, bon, arrivez donc,
Fait's-vous maçon.

 

Retour au sommaire du XIXe :

Retour au sommaire du Chansonnier :