Filles du Ciel ...
Cette feuille n'est pas datée, mais elle fait partie d'un lot de trois documents manuscrits (sans doute de la même main), dont l'un (concernant la Loge des Vrais Amis Réunis à l'Orient de Nice, voir ci-dessous) porte la date de 5797.
Sa partie droite comprend, en bas, le début d'une chanson bien connue (qui se poursuit au verso de la feuille) et, en haut, quelques vers qui semblent bien constituer une chanson à notre connaissance inédite et dont, sauf erreur, nous n'avons pas encore pu voir de version imprimée :
Filles du Ciel aimables
déïtés, Venez pour diriger nos travaux innocents
Vous trouverez la lumière Eternelle Filles du ciel .... |
En face, à la partie gauche de la feuille, on trouve quelques vers, cette fois profanes, mais bâtis exactement selon la même structure (10-12-8-8 / 12-12-8 / 10-12-12-12 / reprise du 1er couplet). Le Frère poète les a-t-il notés là pour les utiliser comme modèle pour sa versification ?
Nous avons pu les identifier comme étant de Pierre Laujon à la scène IV du ballet-héroïque en 1 acte (1776) Æglé :
paisible bois verger délicieux Æglé me croit berger
que mon cœur est flatté Comme
berger je goûterai près d'elle paisible bois verger délicieux |
Même si cet air a connu à l'époque un très grand succès, nous n'avons pu encore en trouver la partition, qui est de Pierre de la Garde.
Le thème d'Astrée et de l'Age d'Or est une constante dans le chansonnier maçonnique du XVIIIe. Et, même si elle est de l'époque post-révolutionnaire, la chanson reste bien dans le ton et le style de celui-ci.
la Loge niçoise des Vrais Amis Réunis On trouve diverses informations sur cette Loge dans l'article d'Yves Hivert-Messeca, La franc-maçonnerie dans le département des Alpes-Maritimes sous le consulat et l'empire :
On peut ajouter que Masséna en fut Vénérable d'honneur et que Jean Joseph Dalmas Balmossière-Chartroux (1761-1800), fils d'un des fondateurs, en fut membre. |
Commme mentionné plus haut, un des documents de ce lot porte la date de 5797 : c'est un brouillon de formule de diplôme de Maître, émanant de la Loge en question, les Vrais Amis Réunis à l'Orient de Nice. Vu son intérêt, nous avons estimé utile de le présenter ici, même s'il n'a rien à voir avec la chanson maçonnique.
La Loge est entrée en activité en 1796 ou 97, mais, comme indiqué ci-dessus, ce n'est que quelques années plus tard qu'elle s'intégra au Grand Orient de France.
L'intérêt de ce document est donc de dater de l'époque précédant cette intégration. Si le reste du texte est classique, la formule inaugurale est en effet, de ce fait, différente et mérite d'être relevée :
A la Gloire du Grand Architecte de l'Univers, au nom et sous les auspices de la République française et de toutes les Loges Régulières de France, d'un lieu très éclairé, très fort, très Régulier où règnent la Vertu la Concorde et l'égalité.
Quelques mots semblent avoir été biffés dans ce texte : nous les avons laissés en maigre.
Le fait de placer les Travaux sous les auspices, non d'une Obédience maçonnique comme il est d'usage, mais d'une entité profane, à savoir la République française, est significatif. Il faut se rappeler qu'à l'époque :
l'intégration de Nice à la France est récente (1793)
le Grand Orient se réveille à peine après sa quasi-léthargie causée par la Révolution
après les soupçons dont elle a fait l'objet pendant cette période, la maçonnerie a intérêt à afficher son civisme.
Il faut noter qu'à la même période une Loge bruxelloise disait travailler sous la protection de la République Française.
On peut voir en exergue du texte la devise Veritas - Concordia - Aequalitas (qui est aussi - indice d'un lien de filiation ? - celle de la Loge toulousaine homonyme, laquelle était active à la même date). On remarquera la parenté entre cette devise et la formule ci-dessus (où règnent la Vertu la Concorde et l'égalité), la seule différence étant (s'agirait-il d'une erreur de traduction du rédacteur ?) la Vertu à la place de Veritas (la Vérité).
Signalons que le troisième document du lot est une liste descriptive des 7 péchés capitaux, suivie de l'énumération des remèdes propres à les combattre.