Midi, maçons ...
Cliquez ici pour entendre cet air, emprunté à la page concernée d'un site spécialisé
Comment s'étonner que le célèbre cantique de Noël d'Adolphe Adam, Minuit, Chrétiens, créé en 1847 sur des paroles de Placide Cappeau, ait donné lieu à des transpositions maçonniques ?La partition originale peut être vue ici via une page consacrée à l'histoire du Minuit, Chrétiens.
Nous avons trouvé ce cantique dans deux imprimés :
- au recueil d'Orcel de 1867 (pp. 19-20, images ci-dessous), où l'auteur est identifié comme le Frère Perin, 18e
- avec un texte strictement identique, au Calendrier maçonnique pour l'An de la Vraie Lumière 5877 - où l'auteur est orthographié Perrin -, qui donne plus de précisions sur son origine et sa date :
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MIDI CANTIQUE D'OUVERTURE
AIR : Noël (D'ADAM) Midi, maçons, c'est l'heure
fraternelle
Tous à l'abri sous la voûte azurée,
Ouvrons, ouvrons les portes de nos temples, F. Perin, 18e. |
D'autres parodies du Minuit, Chrétiens sont visibles à cette page-ci et (probablement) à celle-là.
Placide Cappeau, le parolier de Minuit, Chrétiens : un Frère ?
Cependant, selon la page concernée du site Musica et Memoria, Placide Cappeau n’était pas du tout un homme d’église, un fervent catholique, mais au contraire un libre penseur, un voltairien. Au culte d’un Dieu, il préférait celui de l’Humanité. Aurait-il été maçon? C'est en tout cas ce que pense Jean-Yves Bronze dans son article de la revue canadienne La Scena musicale, où (sans citer ses sources) il lui attribue la qualité de maire de Roquemaure et le qualifie aimablement de franc-maçon, de surcroît alcoolique. Selon un article de Michel GIRAUD, certains évêques vont interdire pendant quelques temps " Minuit chrétiens " dont A. de LAMARTINE disait : " c’est la Marseillaise des chrétiens ". Le cantique déplaisait à certaines soutanes : Alfred Adam n’était-il pas juif, et Placide Cappeau, ivrogne et anticlérical notoire? On lira aussi avec amusement le venimeux article de l'abbé Hervé Belmont sur son pieux blog Quicumque : pour lui, Minuit, chrétiens est le chant de la rébellion fondé sur l’incroyance et inspiré par les fumées de la pensée proudhonienne. * Cappeau réécrivit d'ailleurs son texte, qu'il fit paraître en 1876, dans son ouvrage Le Château de Roquemaure, poème historique en vingt chants, sous le titre Cantique à l’orgue de Roquemaure. On pourra ci-dessous comparer les deux versions, dont la deuxième (à droite) est effectivement moins dévote (on remarquera aussi que le dernier couplet passe en vers de 12 pieds au lieu de 10). Il s'en est expliqué lui-même : Nous avons cru devoir modifier ce qui nous avait échappé au premier moment sur le péché originel, auquel nous ne croyons pas.
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Cette chanson a été reprise dans le recueil de Dejardin en 1901 sous le titre Midi-minuit maçonnique et en 2 versions, l'une pour l'ouverture et l'autre pour la fermeture des travaux (mais il ajoute en note que ce chant peut également servir pour les Travaux de Table), avec la mention paroles du Frère Dejardin.
Mais en fait, pour l'ouverture, Dejardin a réutilisé le texte du premier couplet ci-dessus, avec de légères modifications (marquées en gras ci-dessous) :
Midi, maçons, c'est l'heure
fraternelle
Où nous devons commencer nos travaux ;
Prenons en main le compas, la truelle ;
L'humanité dépérit sous ses maux.
Francs ouvriers, travaillons en silence,
Car le travail conquit la liberté,
Fraternité, ô mère d'espérance,
Répands sur nous ta divine clarté !
Mais pour la fermeture, il propose un texte qui est sans doute effectivement de son cru :
Minuit, maçons, c'est l'heure
solennelle
Où nous devons clôturer nos travaux ;
Soyons heureux, l'amitié fraternelle
De nos labeurs adoucit tous les maux.
Allons en paix sous la loi du silence,
Et qu'au travail succède la gaîté.
Fraternité, ô mère d'espérance,
Répands sur nous ta divine clarté !