Cantique à Apollon

 Cliquez ici pour entendre un MP3 de l'air 837 de la Clé du Caveau (Vaudeville de la Soirée orageuse)

Cliquez ici (midi) ou ici (MP3) pour entendre le fichier de l'air 514 (Rions, chantons, aimons, buvons !) de la Clé du Caveau, séquencé par B. A.

Ce Cantique à Apollon figure :

Ces deux versions sont identiques par le texte (jusques et y compris les notes de bas de page), mais la deuxième (qui par ailleurs ne propose que le premier des deux airs suggérés par la première) définit l'auteur comme le Frère Liégeard aîné, Maçon de la Loge et de celle de Gand cependant que la première ne cite pas la Loge de Douai mais précise celle de Gand.

La Loge de la Félicité Bienfaisante est effectivement une Loge de Gand. Son Orateur, le Frère Liégeard, fait ici étalage de son érudition dans le domaine de la mythologie grecque. Et le fait qu'à ses yeux tous les maçons doivent de l'indulgence à qui se trouve engagé dans une affaire de jupon est assez piquant ...

Le Frère Liégeard

Le Tableau de la Loge de la Félicité Bienfaisante à l'Orient de Gand pour 1807 confirme bien la qualité d'Orateur, dans cette Loge et à ce moment, de G. B. [ndlr : Georges-Bénigne] Liégeard aîné, Maître. Liégeard était également membre de la Loge de la Parfaite-Union de Douai.

Liégeard est l'auteur d'autres chansons qui ont été publiées, dont, sur ce site, celle-ci, celle-ci et celle-là.

L'Univers maçonnique, recopiant Thory, le définit (col. 372) comme

LIÉGEARD, littérateur, auteur de plusieurs couplets, pièces fugitives, et de l'écrit intitulé : Opinion sur les Emblèmes maçonniques.

On voit ici (à l'occasion d'un discours particulièrement napoléonolâtre à Gand) qu'il était en 1805 Ancien membre du jury d'instruction publique du Département de l'Escaut, associé des Sociétés de littérature de Bruxelles et des sciences et arts de Douai, chef du secrétariat général de la Préfecture. Et on le voit ici décrit, la même année, comme secrétaire particulier du préfet de l'Escaut et membre de la société des beaux-arts et de littérature de Gand. On peut voir ici qu'en 1812 il était le secrétaire général de la préfecture de l'Ourthe, à Liège (où selon Ulysse Capitaine il fut un maçon très actif), et qu'il fut aussi envoyé dans le département de la Sesia pour y exercer la même fonction.

On trouvera ici confirmation de ces informations, avec les dates 1768-1857.

Le fichier Bossu le donne également comme Vénérable, en 1811-3, de la Loge des Coeurs Unis à l'Orient de Verceil, Italie (c'est précisément la préfecture du département de la Sesia).

Le fait qu'il soit désigné comme Liégeard aîné indique qu'il y avait à la Parfaite-Union de Douai un autre Liégeard : probablement celui-ci, qui était son frère cadet :

Edmé Liégeard

Il y avait aussi à la Parfaite-Union de Douai un Edmé Liégeard, ancien élève de Polytechnique, professeur de mathématiques au lycée et secrétaire général de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts (qui a publié son éloge funèbre), décédé en 1807 à l'âge de 35 ans selon Allender. Le fichier Bossu, qui précise cette date (25 octobre), le signale comme initié à Douai en février 1805, Maître en juin et Orateur au moment de son décès.

Le sculpteur douaisien Pierre Guislain Philibert Degand a réalisé son buste en terre cuite.

C'est lui le Liégeard jeune, Maître de la Loge, qui est l'auteur d'un aimable Impromptu le jour de la Saint-Jean qui figure (n° 17, p. 36) au Recueil de 1807 mentionné plus haut.

C'est à lui que la Loge a rendu hommage au cours de sa Pompe funèbre du 12 janvier 1846.

Le Tracé de cette cérémonie mentionne (pp. 18-19) en effet un Liégeard dans la liste des membres décédés depuis 1784 (en citant comme date de décès le 25 août 1808, ce qui diffère de 10 mois) et reproduit l'acrostiche gravé dans le marbre à cette occasion :

L'homme naît pour mourir. Après de longs travaux,
Il arrive épuisé dans la nuit des tombeaux.
Eclairé, sage et bon, s'il a pendant sa vie,
Guidé par les Vertus, bien servi sa patrie
Et fait compter ses jours par de nombreux bienfaits,
Alors à sa mémoire on donne des regrets ;
Rien de lui ne s'oublie, et la reconnaissance
Dans les coeurs vient lui rendre une heureuse existence.

Cet acrostiche figurait précisément déjà (n° 17, p. 101) au Recueil de 1807 précité, sous la signature de Delalande et sous le titre Acrostiche mis sur la tombe du Frère Liégeard jeune.

La note sur Platel, musicien d'un talent distingué, concerne un compositeur qui se trouvait effectivement à Gand à ce moment.

          

               

CANTIQUE A APOLLON.

Air : Amis rions, chantons, buvons
ou Vaudeville de la Soirée orageuse.

 

Amis, c'est au frère Apollon
Que je consacre mon cantique.
Ce Dieu charmant, ce Dieu si bon
Avec Jupiter fut en pique.
On prétend qu'à quelque jupon (1)
Ce grand débat dût la naissance :
Sur un tel point au Dieu Maçon
Nous devons tous de l’indulgence.

 

Jupiter le chassa des Cieux ;
Et dans ce moment très critique, 
On vit le plus savant des Dieux
Obligé de chercher pratique.
L'exilé chez Laomédon (2)
Désirant prouver sa science,
Ce fut au bel art du Maçon
Qu'il accorda la préférence.

 

Pour charmer l'ennui de l'exil,
Ce Dieu, tant qu'il fut sur la terre,
Usait avec un art subtil
Ou de la lyre, ou de l’équerre.
Ce beau talent plus d'un rnortel
L'a conservé dans plus d'un temple :
Parmi nous le Frère Platel (1)
En donne très souvent l’exemple.

 

Jupin observant que son fils
Laissait là-haut beaucoup de veuves, (2)
Et qu’ici bas des apprentis 
Il soutenait bien les épreuves.
Voyant qu'exact à notre loi
Ce fils hon[n]orait sa carrière,
Il lui donna le noble emploi
De verser partout la lumière.

 

Le monde ainsi tient d'Apollon,
Et la lumière et l’harmonie,
Faveur qu'un jour dans Illion (3)
Il dût à la Maçonnerie.
Car, toujours aimant, toujours bon,
Digne des sentiments d'un Frère
L’aimable Dieu se fit Maçon
Pour retrouver Ie ciel sur terre.

 

Afin de soulager ses maux,
Pour nous quelle bonne fortune !
Apollon fut dans ses travaux
Aidé par son oncle Neptune (1).
Depuis l’heureux jour où ces Dieux
Se sont instruits de nos mystères,
Sur mer, sur terre et dans les cieux
Tout Maçon rencontre des Frères.

 

Trois fois honneur au doux bienfait
De la Franche-Maçonnerie
Trois fois salut à l'art parfait
Qui nous rassemble et qui nous lie.
Ne portons point envie aux cieux,
A leurs plaisirs, à leurs mystères,
N'est-ce pas s’égaler aux Dieux
Que de vivre tous en bons Frères.

 

                   Liégeard,

Orateur de la Loge de la Félicité Bienfaisante,
 à l'Orient de
Gand.

  

 

 

 

 

 

 

 (1) La fable attribue une autre cause à cette 
brouille céleste; mais c'est une fable.

 

 

 

 

 (2) Apollon, exilé du ciel, bâtit les murs de 
Troye
.

 

 

 

 

(1) Musicien d'un talent distingué.

 

 

 (2) On prie de croire que l'auteur ne fait allusion ici qu'aux neuf sœurs.

 

 

 

 

 (3) On pardonnera cette opinion à l'auteur. On peut se permettre de bâtir des fables sur la fable, surtout quand le but est moral.

 

 

  

 

(1) La fable dit que Neptune concourut aussi à la construction des murs de Troye.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voir ici sur l'air du Vaudeville de la Soirée orageuse.

L'air (erronément) mentionné comme Amis rions, chantons, buvons est évidemment plutôt l'air Rions, chantons, aimons, buvons ! 

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