Ronde maçonnique
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Le chansonnier maçonnique et profane d'Azé commence par deux chansons qui, sur un ton différent - il est très sérieux pour la première et plus guilleret pour la seconde - nous parlent des conditions nécessaires pour devenir maçon et nous éclairent sur les critères qui à l'époque permettaient de distinguer un bon maçon (potentiel) d'un profane inacceptable, thème déjà utilisé au siècle précédent et qu'on trouve aussi, à la même époque, dans un cantique de Jouenne.
Celle-ci est la deuxième et elle occupe les pages 4 à 7.
Il semble vraisemblable que certains au moins des caractères mentionnés correspondent à des personnages réels, éventuellement effectivement candidats à la Loge Isis, mais cela semble bien difficile à décrypter ...
Les traits de caractère suivants sont considérés comme positifs :
être (couplet 1) un gai troubadour ou (couplet 2) un bon vivant
être (couplet 3) direct et entreprenant
philosopher (couplet 4) conformément à la raison
avoir (couplet 5) l'esprit libéral (Ndlr : La Minerve, devenue ensuite La Minerve française, était un quotidien fondé en 1818. Libéral, favorable à la Charte constitutionnelle, il avait des tendances bonapartistes et républicaines. Ce couplet témoigne donc pour le moins d'un manque d'enthousiasme pour le régime en place ... C'est une des premières allusions ouvertement politiques qu'on trouve dans le chansonnier)
manifester (couplet 7) l'esprit démocratique d'égalité, hérité des Loges du XVIIIe
être (couplets 8 et 10) bon patriote
fonder (couplet 9) sa vertu sur ses efforts plutôt que sur sa dévotion
Ceux-ci par contre sont considérés comme rédhibitoires : la servilité (couplet 1), l'avarice (couplet 2), la misanthropie (couplet 3), les préjugés démodés (couplet 4), la cuistrerie (couplet 5), le complexe de supériorité aristocratique (couplet 7), la traîtrise (couplet 8), l'esprit de collaboration avec l'occupant (couplet 10), et la tartufferie (couplet 9).
Une chanson très semblable, et d'ailleurs sur le même air et sur le même modèle, traitera le même sujet quelques années plus tard, et la comparaison n'est pas dépourvue d'intérêt.
Caffardin Caffardin, assimilé ici au prototype de cette tartufferie, est un des personnages - qualifié dans la distribution de rentier, congréganiste - du drame d'Arago et Duvert évoquant les Trois Glorieuses et intitulé 27, 28 et 29 Juillet, où il joue un rôle conforme à ce que son nom (cafard = bigot, tartuffe) donne à prévoir. L'Histoire des théâtres de Rouen en dit ceci :
En effet Caffardin, le premier jour, s'était réjoui des ordonnances et avait renié, parce que libéral et donc révolutionnaire, son neveu étudiant. * Mais voilà ... cette pièce date de 1830, alors que notre chanson est de 1819 ! Il est donc hors de question que la pièce ait pu inspirer notre auteur. Caffardin était sans doute un type populaire bien connu, dont le nom ait été utilisé dans les deux cas. Notons que, dans la comédie Ninon de l'Enclos de Henrion et Armand Ragueneau, créée en 1803, un personnage nommé Caffardini jouait déjà un rôle aussi hypocrite et peu sympathique. |
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