Cérémonie funèbre aux Neuf Soeurs

 

Le 7 mars 1785, la Loge des Neuf Soeurs évoquait la mémoire de trois de ses membres, décédés dans le courant de l'année 1784 : l'Abbé du Rouzeau (littérateur, il était Surveillant en 1779), Court de Gebelin et le comte de Milly (colonel de dragons, il était membre de l'Académie des sciences, où son éloge funèbre fut prononcé par Condorcet ; 1er Surveillant en 1779, il fut élu Vénérable en 1783). 

La Correspondance secrète, politique, & littéraire de Guillaume Imbert de Boudeaux rapporte cet événement (p. 401) :


Qu'êtes-vous devenus, enfans de la Lumière, 
Qui faisiez de ce temple & l'amour & l'orgueil ?

Au milieu de votre carrière, 
Tombés sous la faux meurtrière, 
Vous voilà descendus dans la nuit du cercueil : 
Nous n'embrassons qu'une poussière 
Sourde & muette à notre deuil.

Qu'êtes-vous devenus, enfans de la lumière, 
Qui faisiez de ce Temple & l'amour & l'orgueil ? 

Vous vivez à jamais, vous vivez pour la gloire ; 
Les œuvres du génie ont désarmé le temps : 
Le jour de votre mort fut un jour de victoire ; 
Il a conquis à vos talens 
Une éternité de mémoire. 
Vous vivez à jamais, vous vivez pour la gloire. 

Il est donc précisé que cet hymne funèbre, dont les paroles sont de Roucher et la musique de Piccinni, fut chanté par les Frères Lays, Rousseau et Chéron.

Le Bihan (dans son ouvrage Francs-maçons parisiens du Grand Orient de France) mentionne ces derniers : le chanteur Jean-François Lay (ou Lais ou Lays) et Rousseau étaient membres de l'Académie Royale de Musique, et membres à la fois des Neuf Soeurs et de Saint Jean d'Ecosse du Contrat Social ; Amiable nous apprend que Lay était un ténor grave très en vogue ; ses débuts à Toulouse lui firent une telle réputation qu'il fut contraint (par une lettre de cachet !) de rejoindre la capitale, où il chanta à l'Opéra jusqu'en 1822. Il contribua à populariser la Marseillaise. Chéron, musicien et membre de l'Académie Royale de Musique, n'est au Tableau que des Neuf Soeurs.

La réédition par EDIMAF en 1989 de l'ouvrage de Louis Amiable, Une loge maçonnique d'avant 1789, la loge des Neuf Soeurs, augmenté d'un commentaire et de notes critiques de Charles Porset, reproduit également ces données, à la p. 167 de cet addendum. La source utilisée par Porset est le Fonds Maçonnique de la Bibliothèque Nationale [Baylot FM' 148(8)]. Le même Amiable a d'ailleurs publié en 1895 l'ouvrage Un poème révolutionnaire en 1779 : Les mois, de Roucher.

Le Journal Encyclopédique a également donné une relation de cette cérémonie.

L'année suivante, le même Roucher (portrait ci-dessous) prononcera aux Neuf Soeurs, le 3 avril 1786, un Chant funèbre pour Elie de Beaumont, qui a été reproduit dans l'Almanach des Muses pour 1787.

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