Les chansons de Félix Bovie

Peintre, aquafortiste et graveur, Félix BOVIE (1812-1880) avait un violon d'Ingres : la chanson. Il la pratiquait avec une adresse qui reçut de vifs encouragements dans les milieux auxquels il consacra ses loisirs : la Société vocale d'Ixelles, le cercle des Agathopèdes et les loges maçonniques. Il réunit ses Chansons en 1864 dans un volume joliment illustré et gratifié de trois préfaces, dues à Emile Greyson, Charles De Coster et Victor Lefevre. La chanson leste y voisine avec la chanson maçonnique. Grivois ? D'entrée de jeu, Bovie se disculpe :

Vaudrait-il mieux être un vil hypocrite, 
Couver mes feux sous un masque trompeur, 
Etre mielleux et faux comme un jésuite, 
Baisser les yeux et jouer la pudeur ? 
Vaudrait-il mieux être un pilier d'église, 
Un plat cafard hantant chaque sermon ? 
J'aime encor mieux un peu de paillardise,
Dût-on toujours me traiter de cochon (bis).

La troisième préface du recueil de Bovie était d'un style inattendu : "Jan Vermillen ! On va impremer les dontjes de Félix Bovie ! Quois'que les curés vont dir' à c' t'heur' ? ". Elle était signée Coco Lulu, pseudonyme de Victor LEFEVRE (1822-1904), membre des Amis Philanthropes, fonctionnaire communal le jour et explorateur du quartier des Marolles la nuit.

  (source pour Bovie et Lefevre : l'ouvrage de Paul Delsemme, Les écrivains francs-maçons de Belgique)

On lira également avec le plus grand intérêt l'article de Jeffrey Tyssens, Félix Bovie (1812-1880) : poète et chansonnier dans la franc-maçonnerie bruxelloise.

Cet article a été reproduit en 2019, sous le titre Je bois à toi, sublime Intelligence - Félix Bovie, chansonnier franc-maçon à Bruxelles au XIXe siècle, dans le n° 113 de la revue La Pensée et les Hommes, FRANC-MAÇONNERIE ET MUSIQUE.

On y apprend notamment que Bovie avait été initié en 1837 à la Loge des Amis Philanthropes, dont il s'est désaffilié en 1850 pour rejoindre celle des Vrais Amis de l'Union (sans doute - outre d'autres raisons mentionnées par Tyssens - désapprouvait-il, comme il le chante ici, l'orientation très politique de la première, contre laquelle s'élevait la seconde).

Sur ce site figurent trois chansons qui peuvent être attribuées avec certitude à Bovie :

On connaît également un cantique La Foi, l’Espérance et la Charité qu'il a chanté à Union et Progrès (la loge ou - vu le titre - le chapitre ?), qu'il termine par :

Car, malgré les édits
Qui nous ont tous maudits,
Je ne crois pas au feu
Qu'on nous promet sans cesse de par Dieu.

On trouve ce cantique dans son recueil précité, où l'on remarquera aussi la Philosophie du vieux curé, chanson d'un simple, pacifique et modeste curé de campagne épicurien qui ne manque pas de signaler que

Dans mon église, on ne s'occupe guère
De condamner messieurs les francs-maçons.
 

En outre, le Musée belge de la Franc-maçonnerie détient un cahier manuscrit autographe (et non daté) de Félix Bovie. Ce cahier comprend notamment l'une ou l'autre chanson dont il n'est pas l'auteur, mais qu'il a sans doute recopiée - éventuellement pour la chanter lui-même - après l'avoir trouvée à son goût, mais également celle mentionnée ci-dessus sous le titre Mes rétractations, et qui portant sa signature peut donc lui être attribuée avec certitude.

 son monument funéraire au cimetière d'Ixelles (détail à droite)

 

deux portraits de Bovie (celui de gauche est par Félicien Rops)

 

 

 

 

une chanson (profane) de Bovie, interprétée par Stefaan Vandenbroucke accompagné à la guitare par Alexander Makay, sur le CD annexé à l'ouvrage Maçonnieke Chansons in negentiende-eeuws Belgie de David Vergauwen (éditions ASP)

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