CANDEUR (Loge de la). Association en partie maçonnique,
qui prit le nom de Loge d'adoption de saint Jean de la Candeur. — Première assemblée du 21 mars 5775. — Le marquis de
Saisseval élu vénérable. — Le comte de Belbe, 1er surveillant, le comte de Strogonoff
2e surveillant. — Le frère Baron [ndlr : Bacon] de la
Chevalerie, gr. orateur terrible. — Le fr. Bouvard fit les fonctions de secrétaire. — La comtesse de Choiseul-Gouffier et la princesse de
Polignac furent reçues dans cette assemblée.
Le premier procès-verbal est signé par la comtesse d'Oza, inspectrice, L. Turpin de Crissé fils, prince de Nassau, F. Simon,
etc. Le banquet eut lieu le même jour. — Tissot signa comme secrétaire.
La deuxième assemblée eut lieu le 23 mars 1775. Les applaudissements se faisaient par le cri Eva, Eva, etc. — La troisième
assemblée le 8 avril suivant. — Des couplets du comte de Saisseval, sur l'air :
C'est la fille à Simonette,— chantés le 20 avril au
banquet.
Le comte de Boufflers, F. d'Havrincourt, le comte de Ségur figurent dans les assemblées suivantes. Les comtes de Gouy et
de Sesmaisons font des discours.
Le registre finit à la soixante-cinquième assemblée qui eut lieu le 10 février 1785, après dix ans d'existence. — La quête
produit 43 1 fr. 5 s. 9 d.
... du moment qu'on sut que plusieurs dames avaient été initiées aux premiers mystères
de la maçonnerie, il se forma plusieurs loges, dites d'Adoption, parce que l'on voulut bien y adopter les personnes du sexe. La
duchesse de Bourbon fut nommée grande-maîtresse de ces sortes de réunions. Celle qui obtint en France le plus d'illustration et
de splendeur, par la noblesse et la distinction des dames qui y figurèrent, fut la loge d'adoption sous le titre de
la Candeur,
à Paris. Son établissement date du 21 mars 1775 ; il est dû au zèle des sœurs marquise de
Courtebonne, comtesses Charlotte
de Polignac et de Choiseul-Gouffier, vicomtesse de Faudoas et marquise de Genlis qui y introduisit bientôt la comtesse de
Brienne.
Nous avons eu dans les mains le registre original des procès-verbaux des séances de cette piquante association (voyez le
Bulletin du Bibliophile, de Téchener, année 1848, p. 197, n° 308). Dans la première assemblée datée du 21 mars 1775, le marquis de Saineval
[ndlr : Saisseval] est élu vénérable ; le comte de Balbi,
1er surveillant ;
le comte de Strogonoff, 2e surveillant ; le frère Bacon de la Chevalerie, gr.
orateur-terrible ; le frère Bouvard remplit les
fonctions de secrétaire. La comtesse de Choiseul-Gouffier et la princesse de Polignac furent présentées et admises dans le
cours de
cette première séance. Le premier procès-verbal est signé en original par la comtesse
d'Oza, inspectrice, L. Turpin de Crissé fils, le prince de Nassau, St-Simon, etc. Tissot signa comme secrétaire. Le premier banquet eut lieu le même jour à la suite
de la séance sérieuse.
La seconde réunion eut lieu le 23 mars 1775 ; la troisième le 8 avril suivant. Le 20 avril, pendant le banquet, le comte de
Saineval chanta des couplets sur l'air : C'est la fîlle à Simonette ; les applaudissements de la société se manifestaient par le cri :
Eva, Eva ! etc. — Les noms des comtes de Boufflers, du frère d'Havrincourt, des comtes de
Ségur, de Gouy et de ses maisons [ndlr :
Sesmaisons] figurent dans les séances suivantes ; les deux derniers y prononcent des discours.
Le 25 mars 1777, la loge fut visitée par les duchesses de Chartres et de Bourbon et la princesse de
Lamballe ; l'on y reçut les comtesses de Montchenu et de la Blanche. Mesdames
d'Espinchal, la présidente de Nicolaï, les marquises de Rochambeau, de
Loménie, de Monteil et d'Havrincourt, les comtesses de Béthisy, d'Evreux et d'Erlak, et une foule de grandes dames de la
cour voulurent en être. Le livre des procès-verbaux originaux dans lequel nous avons puisé quelques renseignements est
un manuscrit pet. in-f° à moitié rempli ; toutes les signatures sont
autographes ; les feuillets écrits se terminent à la 65e assemblée
qui eut lieu le 10 février 1785, après dix années d'existence de cette association fondée à la fois sur le plaisir et l'humanité.
Chacune des séances se terminait par une collecte qui servait à des oeuvres de
bienfaisance ; la dernière produisit, suivant le procès-verbal, 431 livres, 5 sols, 9 deniers.
Dans cette assemblée d'élite les frères faisaient des discours sur les vertus
humanitaires ; ils y mêlaient de petits vers à la louange des nobles et belles sœurs qu'ils avaient sous les yeux et
qui étaient si dignes de les inspirer, et ils proposaient des prix sur des questions d'économie politique, science alors fort à la
mode. Ils offrirent entr'autres une médaille d'or de 300 fr. pour le meilleur mémoire sur la
manière
d'élever les enfants trouvés jusqu'à l'âge de sept
ans.
De si grands seigneurs et de si nobles dames ne pouvaient s'occuper seulement de matières graves et
sévères ; aussi avaient-ils coutume, après les travaux réguliers, de passer
à d'autres exercices. Comme la loge possédait un corps d'harmonie des mieux montés, on s'avisa de jouer la comédie de société et
particulièrement l'opéra-comique. Ainsi, le 5 février 1778, à la suite d'un banquet remarquable par les notabilités nobiliaires qui y
figurèrent, on y représenta l'Ami de la Maison, dont les rôles furent remplis avec un talent rare par les sœurs comtesses de
Brienne et Dersalles [ndlr : Dessalles] et les frères vicomte de Gand, marquis de Caumartin et comte Maxime de Puységur. La comtesse de
Rochechouart ayant été reçue dans la même séance, on y chanta de gracieux couplets à cette occasion, composés par le comte de
Sesmaisons et le frère Bacon de la Chevalerie. On ajouta à la pièce jouée un vaudeville tout entier, fait par le comte de Gouy,
et chanté en l'honneur du duc et de la duchesse de Chartres présents à cette fête de l'association. Un grand bal termina cette
journée, où figuraient les de Ségur, d'Imecourt, de Luynes, d'Astory, de Tracy, d'Escars, de Béthune, de Praslin, de
Chabrillan, de Rennepont, de la Châtre, de Boufflers, et tant d'autres noms illustres que nous sommes forcés de supprimer pour abréger.