Couplets pour La Trinité

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Ces couplets débridés, intitulés Couplets chantés au banquet de la Loge de la Trinité, le 21 décembre 1836, jour de saint Thomas, par le Frère Chatelain, ont été rendus disponibles par la BNF.

Le 21 décembre était à l'époque (en 1969, il a été déplacé au 3 juillet) effectivement le jour de l'apôtre Saint Thomas : A la saint Thomas, les jours grandissent d'un pas.

Saint Thomas

L'esprit des Lumières ?

Saint Thomas apôtre, qui aurait construit un palais en Inde, est désigné ici comme le patron des architectes et des maçons (opératifs ! )

C'est pourquoi on le représente avec une équerre (image de gauche) ou (image de droite) avec la maquette d'un bâtiment.

Mais il est surtout célèbre pour l'épisode (Si je ne vois pas dans les mains la marque des clous, si je ne mets pas ma main dans son côté, non, je ne croirai pas ce que vous me dites) qui lui a valu le qualificatif d'Incrédule et qui a été figuré par tant de peintres comme Rembrandt, Rubens ou le Caravage.

On peut donc aussi le considérer comme le patron des sceptiques (et, pourquoi pas, des maçons adogmatiques ?), lui qui a si bien anticipé la devise Nullius in verba (ne rien croire sur parole) de la Royal Society (dont on connaît les accointances avec la franc-maçonnerie naissante).

Voir ici sur l'air Mon père était pot.

Who's who ?

Les allusions personnelles multipliées dans ce texte sont évidemment, pour la plupart, devenues incompréhensibles, faute de connaître leur contexte.

Nous avons cependant pu identifier certains des Frères mentionnés :

Brévière

Le premier des membres de la Loge mis en évidence par Chatelain est un nommé Brévière.

Bossu mentionne un Louis-Henri Brévière (1797-1869), graveur de lettres à Rouen puis rénovateur de la gravure sur bois, initié en 1823 à La Constance de Darnetal dont il devint rapidement Vénérable, membre à partir de 1828 puis Vénérable de la Persévérance couronnée à Rouen, Orateur puis Vénérable dans les années 1830 de La Trinité avant de devenir membre et Vénérable du Progrès maçonnique à Belleville. On lira à son sujet le Rapport sur les travaux de Henri Brévière, dessinateur et graveur, par Alfred Baudry, prononcé dans une fête maçonnique célébrée à Rouen le 16 janvier 1867 par les trois Loges Les Arts-Réunis, La Persévérance-Couronnée et La Vérité pour la remise d'une Récompense honorifique décernée à cet Artiste, document qui retrace ses carrières tant professionnelle que maçonnique. On voit ici l'une de ses gravures.

C'est évidemment le nôtre, et il est vraisemblablement Vénérable à ce moment, ce qui explique qu'il soit le premier membre de la Loge cité par l'ex-Vénérable.

Parmi les autres :

  • Delsarte nous est évidemment bien connu.

  • Il y avait effectivement à cette époque à Paris un facteur de pianos nommé Souffleto, comme on peut le voir par exemple ici.

  • Macquart était le couvreur en début 1835, selon le fichier Bossu

  • Millelot était hospitalier en début 1835, selon le fichier Bossu

  • Benoît était trésorier en début 1835, selon le fichier Bossu

Mais nous n'avons trouvé aucun Léger dans la liste de 2865 peintres français du XIXe connus (en mars 2020) de Wikipedia.

       

   

      

Loge de la Trinité

 

 

 

 

COUPLETS

 

CHANTÉS AU BANQUET DE LA L.'. DE LA TRINITÉ,

Le 21 Décembre 1836, jour de saint Thomas,

PAR

le Frère CHATELAIN,

EX-VENérable DE LA TRINITé, ET DéPUTé DE CET ATelier AU Grand Orient DE FRANCE.

 

 

 

Air : Mon père était pot.

Ce matin mercredi vingt-un
Ouvrant mon bréviaire,
J'y lis ces mots : « Ce soir chacun
Fêtera BRÉVIÈRE. »
Mais me dit Thomas,
Moi ne croire pas.......
Tu ne crois pas...... A preuve,
Viens voir lenturlu,
Saluer l'élu
Des enfants de la veuve !

 

Je lus encore : On fêtera
Certain frère DELSARTE,
Qui la Loge surveillera
A l'instar d'un Socrate !
Puis frère MACQUART,
Frère GAUDISSART.
Et pour donner la preuve.
A ces vrais maçons
Que nous les aimons....
Nous buvons à la veuve !

 

On pourrait me dire : « O rateur ! »
Si, de notre tribune,
Je ne saluais l'orateur
D'une louange opportune :
Frère CAVALLIER
Est un chevalier
D'éloquence.... à l'épreuve ;
Aussi nous disons,
Buvons, francs maçons,
A c't enfant de la veuve !

 

Je crois ici trouver le joint
Pour dire sans scrupule,
Ce que je pense de l'adjoint :
Or donc, sans préambule,
Du frère CIRIAC
Je chante le tac,
Et, j'en donne pour preuve,
Ce jus délecté....
Et qu'à sa santé
Nous buvons à la veuve !

 

Frères, je serais fol à lier,
Vrai, foi de gentilhomme !
Si j'oubliais l'hospitalier
De vos biens l'économe :
On ne peut nier
Que notre aumônier
N'ait un zèle, à l'épreuve....
Tout dit qu'en un mot
Dieu fit MILLELOT
Pour consoler la veuve !

 

Point ne veux fair' de passe-droit,
Or, vitement j'arrive
A notre cher frère BENOÎT,
C'est ma prérogative.
Heureux bouclier
De notre atelier,
Il nous donne la preuve,
Qu'un bon trésorier
Fait fructifier
Le denier de la veuve !

 

Pour ne pas trop verbiager,
Je dirai d'abondance,
Combien notre frère LÉGER
Travaille avec aisance.
Son gentil pinceau
Bientôt d'un tableau
Vous fournira l'épreuve ;
Epris du dessein,
Vous boirez sans frein
A c't enfant de la veuve !

 

Je ne terminerais pas, si
Je disais le mérite
Des frères, dont je vois ici
La phalange d'élite.
A nous si liés,
Nos Affiliés
Ont déjà fait leur preuve ;
Aussi nous buvons
A ces vrais maçons,
Comme on boit à la veuve !

 

Frères, je finis subito,
Mais avant, je veux dire
A notre frère SOUFFLETO,
Tout ce qu'il nous inspire :
Son forte-piano,
Touché par Ino,
Ne l'eût pas rendu fleuve ;
Et ses deux garçons,
Joyeux, bons lurons,
Eussent fêté la veuve !

 

Pour clore mes chants dignement,
Je bois à vous tous, frères
Visiteurs, qu'ici bien souvent
Je vois à nos mystères.
Notre Trinité
Vous dit : Venite....
Faites-en donc l'épreuve.
Ah! sans examen
Répondez: Amen !
Et je bois à la veuve !

 

PARIS — Imprimerie de DEZAUCHE, faubourg Montmartre, n° 11

L'imprimeur du document, Jean André Dezauche, est mentionné par le fichier Bossu, qui ne le désigne cependant pas comme maçon.

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