Les 3 Globes

 

La Loge aux Trois Globes (zu den drei Weltkugeln) avait été fondée en 1740 ; après avoir créé d'autres Loges, elle s'institua en 1744 en Grande Mère-Loge nationale, dont Frédéric II accepta le titre de Grand Maître.

On trouve ici des détails sur ses premières Loges.

Au XVIIIe, elle a cultivé, contrairement à sa rivale La Royale York de l'Amitié, les tendances les plus ésotériques, adhérant à la Stricte Observance Templière et entretenant l'Ordre de la Rose-Croix d'Or d'Ancien Système.

En 1801, comme on peut le lire (p. 196) dans  l'ouvrage de Karlheinz Gerlach, Die Freimaurer im Alten Preußen 1738–1806, Die Logen in Berlin, elle fonda une société musicale maçonnique, le Collegium musical des Loges unies de Berlin. 

Leçons de modestie

Après avoir - sans succès puisqu'elle sera quand même finalement dissoute en 1935 - tenté de flirter avec le nazisme en proclamant son antisémitisme (voir à ce sujet sur le web un très intéressant article d'Alain Bernheim, article qui figure également à son ouvrage Une certaine idée de la franc-maçonnerie, paru chez Dervy en 2008), elle renaît de ses cendres après la guerre.

Nous devons ... nous souvenir que la liberté, qui nous est si chère, a parfois été mise à mal par des francs-maçons. Des trafiquants d'esclaves à Augusto Pinochet, en passant par des maçons allemands qui, illuminés par la mystique nazie, trahiront l'idéal maçonnique, le devoir de mémoire maçonnique implique de ne pas se reposer sur ses lauriers.

(Franz André, dans son article La liberté : un concept entre gris clair et gris foncé, paru dans le 68 de la revue La Pensée et les Hommes)

On lira également avec intérêt à ce sujet l'article (et surtout ses précieuses annexes) Association Maçonnique Internationale sur le riche blog Si Fodieris Invenies.

Voir aussi, sur la genèse de cette évolution, la remarquable analyse de Yves Hivert-Messeca dans son ouvrage L’Europe sous l’acacia (ce chapitre est consultable ici).

On lira encore trois autres articles (en anglais cette fois) d'Alain Bernheim :

  • United Grand Lodge and United Grand Lodges of Germany, 1946-1961, paru dans Ars Quatuor Coronatorum et republié ici.

  • "The blue forget-me-not", another side of the story, publié ici par Pietre-Stones

  • German Freemasonry and its attitudes toward the nazi regime, publié ici par Pietre-Stones.

Voir aussi l'article de Didier Le Masson, La dérive de la franc-maçonnerie allemande, paru dans La chaîne d'union 2010/3 (N° 53).

 

L'attitude d'une partie de la maçonnerie italienne vis-à-vis du fascisme n'a d'ailleurs pas été plus glorieuse : dans son article Les exilés antifascistes italiens et la franc-maçonnerie, Anne Morelli signale que :

Dans un premier temps, le Grand Orient de Palazzo Giustiniani n'est pas en reste de prévenances envers le fascisme. Torrigiani, son grand maître, a un projet d'alliance avec Mussolini dans l'espoir de pouvoir le "pousser vers la gauche". Il rend hommage à l'"ordre" fasciste et envoie un télégramme de félicitations à Mussolini le jour de la Marche sur Rome. Les circulaires de Torrigiani en 1921 et 1922, malgré des réserves à rencontre de la violence fasciste, soutiennent cette "force nouvelle" ... Quelques mois avant la Marche sur Rome, Mussolini avait rencontré secrètement Torrigiani, grand maître de Palazzo Giustiniani, mais n'avait pu arriver à un accord avec lui. Il semble par contre qu'il avait obtenu l'appui de la Piazza del Gesù en lui promettant en échange des postes importants au sein de l'Etat ...

Cependant, ajoute-t-elle

Le fascisme, arrivé au pouvoir avec l'aide de la bourgeoisie (avec laquelle l'Ordre agissait en osmose), va — une fois maîtrisées les rênes du pouvoir — se "débarrasser" des francs-maçons.

Et, plus loin

l'attitude générale des francs-maçons italiens vis-à-vis du fascisme peut, au mieux, être caractérisée, sans crainte d'exagération, de "servile".

 

Cette Grande Loge existe toujours - tout en ayant, comme on le voit dans le cadre ci-dessus, sérieusement modernisé son emblème - en comprenant une quarantaine de Loges partout en Allemagne.

Elle a publié à plusieurs reprises des chansons.

Les pages Musée virtuel du site de la Grande Loge Nationale Française ont consacré en avril 2007 une exposition virtuelle à la Loge aux Trois Globes, où l'on peut voir l'image (à gauche) de ce diorama fait (vers 1760) de planches de cartons peints et découpés (il vaut la peine de lire ici le très intéressant article de Pierre Noël concernant ce genre de dioramas) et la médaille des 3 Globes (dont on voit ci-contre à droite une autre représentation). 

Il est également question de cette Loge à notre page Frédéric II.

image de gauche : on retrouve les trois mappemondes (globes) à une page de la Sammlung Neuer Freymaurer-Reden, Oden und Lieder, in Teutsch und Französischer Sprache bey Verschiedenen Feyerlichen Gelegenheiten Gehalten in der Loge Zu Den Drey Weltkugeln zu Berlin (Recueil de discours, odes et chants maçonniques nouveaux, en langue allemande et française, pour diverses circonstances solennelles de la Loge aux Trois Globes à Berlin) publiée en 1777 par la Loge.

Les phrases magnus ab integro saeclorum nascitur ordo (le grand ordre des siècles naît sur de nouvelles bases) et redeunt Saturnia regna (voici que revient le règne de Saturne) sont extraites de Virgile (Bucoliques, 4e églogue) qui y annonce le retour imminent de l'âge d'or (thème récurrent dans la chanson maçonnique du XVIIIe, et notamment dans ce chansonnier-ci). Novus Ordo Seclorum est aussi l'une des deux devises apparaissant sur le Grand Sceau des États-Unis d'Amérique.

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