Cantique fait après le 10 thermidor an 2 

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Ce cantique, qui figure aux pages 34 à 36 du chansonnier de la Paix Immortelle (lequel date de 1811 au plus tôt), reprend - avec la note ce Cantique n'est pas nouveau ; mais c'est ici le cas de dire que le vieux vaut bien du neuf - un cantique ancien de Lepitre, qui était précisément membre de cette Loge.

Il met en effet en exergue la date du 10 thermidor an 2 (28 juillet 1794), qui fut celle de l'exécution de Robespierre.

Robespierre - qui, encore aujourd'hui, a des détracteurs mais aussi des défenseurs, aussi acharnés les uns que les autres - n'était pas maçon (contrairement par exemple à son coaccusé Couthon).
 

Quels que soient ses mérites, il ne fut en tout état de cause pas le parangon de certaines vertus maçonniques telles que la tolérance ou l'humanité. 

Ce qui n'a pas empêché l'une ou l'autre Loge de faire figurer son nom ou son surnom dans son titre distinctif : Robespierre et Saint-Just (Montpellier, GOdF, années 1960), Robespierre-Rectitude (Nice, GOdF, 1980), Maximilien l'Incorruptible (Paris, GOdF), l'Incorruptible (Liège, GOB, 1958) et son essaimage Robespierre (Visé, GOB, 1976).

La chute de Robespierre et son exécution le 10 thermidor provoquèrent en tout cas un soulagement général, et furent même une occasion de réjouissance pour beaucoup ; ce fut certainement le cas de Lepitre, auquel ses sentiments royalistes avaient déjà valu quelques ennuis judiciaires sur base du soupçon d'avoir participé à un projet d'évasion de Marie-Antoinette.

Jacques François Lepitre 

Jacques François Lepitre (1764-1821) est surtout connu pour son rôle à la prison du Temple au moment où la famille royale y était détenue. Il a conté ses souvenirs à ce sujet dans Quelques souvenirs, ou notes fidèles sur mon service au Temple, Depuis le 8 Décembre 1792 jusqu'au 26 Mars 1793, et sur quelques Faits relatifs au Procès de la Reine, et à celui des Membres de la Commune accusés de conspiration avec la Famille Royale.

Il a écrit le texte de Cinq Romances pour les illustres prisonniers du Temple mises en musique par Mme Cléry (le professeur de harpe de Marie-Antoinette).

Le Bihan, dans son ouvrage Francs-maçons parisiens du Grand Orient de France, le donne, avec la mention Instituteur et Homme de lettres, comme membre en 1797 du Centre des Amis. Et, selon des informations reçues de Pierre-François Pinaud, il fut membre de la Loge La Paix Immortelle de 1804 à 1809. 

On trouve également son nom dans la Lyre maçonnique de 1811 (nous n'avons pas sous la main ce recueil, mais seulement sa table des matières) comme auteur de 2 cantiques, dont (p. 216) un fait et chanté à l'occasion de la paix et dont l'autre (p. 58), qui porte le titre Les Santés, est vraisemblablement celui-là .

Nonobstant son titre, le cantique ne fait aucune allusion explicite aux événements politiques visés par celui-ci : il se borne à se féliciter du retour de l'amitié (qualifiée de fraternité première), après le souffle destructeur qui a caractérisé la période précédente (c'est-à-dire la Terreur).

A propos de l'air indiqué (Femmes, voulez-vous éprouver ?)

On retrouve un couplet détaché de ce cantique à la p. 20 de la Lyre maçonnique de 1810 :

 

COUPLET MAÇONNIQUE.

Air : Femmes voulez-vous éprouver.

Ils durent si peu les beaux jours !
N'en pas jouir est ce être sage ?
Frères, plus nos plaisirs sont courts,
Plus il faut en régler l'usage.
De ces plaisirs, le plus flatteur
Est le besoin d'aider son Frère ;
Il fut créé pour notre cœur,
Comme nos yeux pour la lumière.

Par le Frère LEPITRE.

Il semble bien aussi que ce cantique ait été chanté par le Commissaire installateur le Frère Pajot aîné lors de la Tenue d'installation de la Loge des Amis Indivisibles.

Mais l'édition la plus ancienne dont nous disposions est en fait aux pp. 130-2 du recueil édité par Desveux en 1804. Mais ici les vers 5 et 6 du couplet 2 se lisent encore : Profanes, vous qu'un voile épais / couvre encore votre paupière, ce qui est grammaticalement incorrect et justifie une correction ultérieure.

Anecdote : dans son ouvrage La franc-maçonnerie en Quercy, Guy Chassagnard rapporte que, le 24 juin 1801, le Frère Cartier, Vénérable de la Loge tourangelle de La Concorde écossaise, en mission du Grand Orient auprès de La parfaite Union de Montauban, chante au banquet ce cantique ... en s'en disant l'auteur.

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