Cuvelier de Trye
Antoine CUVELIER de TRYE (1766 - 1824) est surtout connu comme littérateur. Même s'il rencontra de grands succès en son temps, il n'a pas laissé de souvenir marquant dans l'histoire de la littérature, et est aujourd'hui totalement oublié.
Son souvenir dans l'histoire de la musique est encore plus évanescent. Mais, comme (voir ci-dessous), on lui attribue la musique de quelques-unes de ses romances (ce que confirme, voir ci-contre, une de ses chansons maçonniques, présentée ici), nous pouvons le considérer - même si ce n'est pas à titre principal - comme compositeur et donc lui faire une place sur ce site. |
Cuvelier est également l'auteur - mais cette fois sur une musique, non de lui-même, mais d'Alexandre Piccinni - du texte d'une autre chanson également visible sur le site Chansons et chansonniers maçonniques, la Tolérance, ainsi que d'une ode funèbre chantée lors de la Fête funèbre de 1819 à la Loge des Artistes et d'un Hymne à la Bienfaisance chanté aux Frères Artistes le 18 novembre 1819.
C'est précisément sur une musique du même Piccinni qu'il a écrit le mélodrame en trois actes, en prose et á grand spectacle intitulé Le vieux de la Montagne ou Les Arabes du Liban.
C'est sans doute son goût (qu'il a communiqué à sa Loge) pour l'égyptomanie qui lui a inspiré sa Bataille d'Aboukir (à laquelle a participé Foignet) ou son mimodrame historique et militaire en deux actes intitulé La mort de Kléber ou Les Français en Égypte. Cuvelier est également le fondateur en 1801, avec d'anciens membres de l'expédition d'Egypte, de l'Ordre sacré des Sophisiens, Ordre très égyptomaniaque. Cet Ordre comprenait 3 degrés (aspirant, initié, membre des Grands Mystères) mais n'était accessible qu'aux maîtres maçons, comme l'expriment en termes fleuris ses Règlements (datés de la Grande Pyramide, l'an 15509 de l'ère des Sophisiens) : Nul, dans les pyramides de la République française, n'est aspirant s'il ne connaît l'acacia. Contagion de l'orgueilleuse prétention du système impérial ? Les années de l'Empire sont bien, avec les débuts de l'égyptomanie maçonnique, avec l'Ordre royal militaire, religieux et hospitalier du Saint-Sépulcre de Jérusalem de l'ineffable Chevallier, ou encore avec l'Ordre du Temple de Fabré-Palaprat - sans même parler de la fondation du REAA - celles de l'inflation des délirantes imaginations mythiques et des titres ronflants ... |
En 1825, l'Almanach des Spectacles lui a consacré la notice nécrologique suivante :
ci-contre : portrait de Cuvelier figurant (vis-à-vis p. 348) dans l'ouvrage La franc-maçonnerie artésienne au XVIIIe siècle par Émile Lesueur. |
Voici ce que dit de lui Bésuchet :
CUVELIER DE TRIE (Jean-Guillaume-Auguste), auteur dramatique, naquit à Boulogne-sur-Mer en 1766. Il fut d'abord avocat dans sa ville natale ; puis, par suite de la révolution, il fut employé dans les administrations publiques, et entra comme hussard dans la garde du premier consul Bonaparte ; il parvint au grade de capitaine de première classe commandant des guides-interprètes. Sa santé s'étant affaiblie, il quitta le service et se livra exclusivement aux compositions dramatiques. De 1793 à 1824, il a fait représenter cent dix pièces, comédies, drames, prologues, pantomimes, mélodrames et ballets ; très peu de ces productions ont été faites en société avec d'autres littérateurs : le nom de Cuvelier est célèbre aux petits théâtres, où on lui a donné le surnom de Corneille des boulevards. C'était aussi un homme d'esprit, et on remarque de jolies poésies dans le recueil qu'il a publié. Fondateur et premier vénérable de la loge des Frères Artistes, en 1802, il a rendu des services à l'ordre en consacrant un temple nouveau qui n'a pas cessé d'être remarquable, soit par les doctrines qui y sont professées, soit par les honorables membres qu'il a admis à la lumière, ou affiliés. Cuvelier est mort à Paris le 25 mai 1824.
Fayolle, dans la Biographie universelle, ancienne et moderne, est moins clément à son égard :
CUVELIER de Trye (JEAN-Guillaume-Antoine), qu'on a appelé le Crébillon du mélodrame, comme un de ses rivaux en était surnommé le Corneille, naquit le 15 janvier 1766, à Boulogne-sur-Mer, où il était avocat avant la révolution. Il en adopta les principes avec beaucoup de chaleur, fut nommé, en 1793, commissaire dans les déparlements de l'ouest, puis employé dans l'administration des armées. En 1804, Bonaparte, projetant une descente en Angleterre, décréta la formation de guides interprètes à qui la langue anglaise serait familière, et Cuvelier partit pour Boulogne, avec le titre de commandant en chef de cette compagnie. Le camp de St-Omer quitta brusquement le blocus de l'Angleterre, et devint l'avant-garde de la grande armée. Cuvelier, voyant sa compagnie licenciée, vint a Paris, en 1806, remplir les fonctions de sous-chef dans les bureaux de la commission d'instruction publique, et composa un grand nombre de mélodrames pour les boulevards. Ce dramaturge n'avait alors pour rival que M. Guilbert de Pixérécourt. Depuis il s'est livré au genre du roman, mais avec moins de succès. Il est mort a Paris le 27 mai 1824. Les titres de ses divers mélodrames et pantomines, qu'on ne joue plus , et qui ne reparaîtront sans doute jamais, se trouvent dans les Annuaires dramatiques. II serait inutile et fort long de les donner. Quant au style de ces pièces, on peut s'en former une idée, d'après les phrases suivantes : La bienfaisance est un coupon de la vertu ... L'oreiller du crime est bourrelé de remords. Un brigand dit en a parte: Feignons de feindre, pour mieux dissimuler ! - Voici la liste des romans de Cuvelier : I. Damoisel et bergerette, historiette du XVe siècle, 1795, 1 vol. in-8°. II. Nouvelles, contes , historiettes, anecdotes, mélanges, 1802, 2 vol. in-8°. III. Le bandit sans le vouloir et sans le savoir, 1809, 3 vol. in-12. On lui attribue encore plusieurs ouvrages lyriques, et la musique de quelques-unes de ses romances.
Ses nombreux liens, mentionnés ci-dessus, avec sa ville natale de Boulogne-sur-Mer, expliquent qu'il ait été en 1817 le député de la Loge de cette ville, St-Frédérick des Amis Choisis.
Un de ses cantiques obtint en 1806 un accessit au concours de Littérature Philanthropique et Maçonnique organisé par la Loge de Calais.