Etrennes et Almanachs maçonniques français

La France du XVIIIe siècle a vu une grande floraison d'Almanachs et Etrennes, à parution en principe annuelle.

Dans des almanachs à caractère littéraire tels que l'Almanach des Grâces, l'Almanach des Muses, les Etrennes de Polymnie, les Etrennes Lyriques, anacréontiques, on trouve occasionnellement, même s'il s'agit d'almanachs profanes, des textes maçonniques ; c'est le cas ici, ici, ici, ici, ici, ici, ici, ici ou ici.

Mais il y eut aussi des almanachs spécifiquement maçonniques, en France (et également en Hollande).

Grand-Carteret en donne un répertoire dans son ouvrage Les almanachs français ; bibliographie-iconographie des almanachs, années, annuaires, calendriers, chansonniers etrennes, états, heures, listes, livres d'adresses, tableaux, tablettes et aures publications annuelles éditée à Paris (1600-1895) :

  • A. n° 549 (p. 136) :

ÉTRENNES DE L'AMITIÉ, Ou Nouvel Almanach des Francs-Maçons.

Odi profanum vulgus et arceo.

A Paris, chez la veuve Duchesne, rue St-Jacques. 1775. In-24.

Couplets, chansons et cantiques purement symboliques par M. Nau.

Un almanach avec un titre identique se trouve sur un catalogue Desnos, en 1781, ayant en plus la mention « fig. agréables ».

NB : la France littéraire en 1778 (vol. 3, 2de partie, p. 74) donne de même :

les Étrennes de l'Amitié, ou nouvel Almanach des Francs-Maçons, par M. Nau, in-24 paru en 1775.

Mais la même France littéraire signale aussi (p. 6) un Almanach des Francs-Maçons, par M. Nau, in-32 daté de 1776. 

Selon la France littéraire de Quérard (vol. 6), Fr. Nau est un auteur dramatique et chansonnier né à Paris, auteur - entre autres - de nombreux almanachs chantants (sur les thèmes les plus variés).

  • B. n° 172 (p. 52) :

ÉTRENNES AUX FRANCSMAÇONS. Pour l'Année 1749. [Épigraphe:] Amicitia pares aut accepit, aut facit. M.DCC.XLIX. S.l. [Paris, chez Duchesne.] 1749 et suite. In-32.

Frontispice allégorique sur bois.

Texte composé de chansons ayant toutes pour sujet la franc-maçonnerie.

Parut, dès 1750, sous le titre suivant :

Etrennes curieuses et utiles aux Francs-Maçons. Pour l'Année M.DCC.L. [Epigraphe:] Dulce ridentes socios amabo, Dulce loquentes: Hor. S. l. [A Londres et à Paris.]

Avec titre et frontispice gravés, variant chaque année, mais invariablement composés d'attributs maçonniques : laurier, truelle, équerre, compas. Sur le titre de 1750, dans un nuage, quatre mains se serrant. Le frontispice de 1754, plus orné, représente au milieu d'un salon deux hommes, dont l'un, maçon novice, les yeux bandés, est conduit par son aîné ; comme légende ces deux vers d'Horace :

Ne fidos inter amicos
Sit, qui dicta foras eliminet.

Le texte est un mélange de prose et de chansons ; les mêmes articles se retrouvent quelquefois dans des années différentes, citons : Extrait de l'histoire particulière des francs-maçons de la Grande-Bretagne ; Formule d'un discours prononcé pour l'institution d'une loge ; Vers maçonniques correspondant aux signes de chaque mois :

Ici les Gémeaux :

... Tous les bons maçons sont des frères Gémeaux
Qui se reconnaîtront par d'infaillibles marques.

Là la Balance :

Vous l'avez exilée (Thémis) et ne la verrez plus ;
Mais sa Balance et tous ses attributs
Sont mis entre les mains de la Maçonnerie.

une vente aux enchères de 2019 a proposé, avec cette illustration, ETRENNES DE L'AMITIÉ utiles aux francs-maçons. Londres et Paris, Au Grand Orient de France,  contenant : Un frontispice, un titre gravé, 64 pages de texte et le calendrier pour l'année 1777. Il s'agit sans aucun doute d'une édition apparentée à celle citée ci-dessus.

  • C. n° 208 (p. 63) :

ALMANACH DES FRANCSMAÇONS. A Paris, chez Duchêne, Libraire, rue St-Jacques, au-dessous de la Fontaine St-Benoît, au Temple du Goût. (1753). In-32 (12 sols).

Paraît être la suite des Etrennes aux Francs-Maçons de 1749. (Voir n° 172.)

  • D. n° 248 (p. 71) :

NOUVEL ALMANACH DES FRANCS MAÇONS ET DES FRANCHES MAÇONNES. A Paris, chez Duchéne, Libraire, rue St-Jacques, au-dessous de la Fontaine St-Benoît, au Temple du Goût (1757). In-32 {12 sols).

Suite à l'Almanach des Francs Maçons de 1755 (voir n° 208). Avec quelques couplets nouveaux.

  • E. n° 590 (p. 147) :

ALMANACH DES FRANCSMAÇONS, contenant leur calendrier ; un enthousiasme poétique (sic) ; une lettre en introduction à l'éloge du vénérable grand-maître du Grand-Orient ; et l'éloge de ce grand maître ; par le frère Jakinet, servant du Grand-Orient. Paris, Boudet. 1778. In-32.

  • F. n° 710 (p. 179) : 

710. — MANUEL DES FRANCSMAÇONS ET DES FRANCHES-MAÇONNES. Nouvelle Édition enrichie de plusieurs cantiques analogues à ces deux ordres.

Avoir des moeurs, être droit et sincère,
C'est d'un Maçon l'aimable caractère.

A Philadelphie, chez Philarite, rue de l'Équerre, au Compas [et à Paris, chez Cailleau, Imprimeur-Libraire, rue Saint-Séverin.] (1782). In-32.

Catéchisme, réception du compagnon, cantiques, etc. On y trouve également des couplets au beau sexe.

Se vendait 12 sols et contenait un calendrier.

NB : la BNF a catalogué ce même recueil avec les commentaires suivants :

Nouvelle édition de La vraie maçonnerie d'adoption de Louis Guillemain de Saint-Victor, parue sous l'adresse de Londres, en 1779. L'adresse de Philadelphie est fausse : le cahier intercalaire de 16 p. est constitué d'un "Calendrier pour l'année M. DCC. LXXXIII", portant p. [16] la mention "A Paris, de l'imprimerie de Cailleau, rue Galande", à qui on semble devoir l'ensemble de la publication. Paru vers 1783, d'après l'adresse de Cailleau. 

Aucune de ces publications n'est malheureusement encore, à notre connaissance (en 2019), disponible sur le web.

Nous en connaissons cependant deux par les extraits qu'en a publiés cet autre ouvrage :

Nicolas Le Camus de Mézières (1721-1789) est un architecte qui abandonna son métier en 1770 pour se consacrer à la littérature et au théâtre.

En 1783 il publia L'Esprit des almanachs, analyse critique et raisonnée de tous les almanachs tant anciens que modernes, recension où, pour quelques dizaines d'almanachs existants, il donne un avis (souvent sévère) et copie quelques extraits. Le projet, qui ne semble pas avoir eu de suite, était d'en publier un nouveau volume tous les six mois.

Deux des almanachs qu'il commente ainsi (et qui sont tous deux mentionnés au tableau ci-dessus) concernent la maçonnerie :

  • (aux pp. 179-183) Étrennes de l'Amitié ou nouvel Almanach des Francs-Maçons (il s'agit du A ci-dessus). Le Camus ajoute qu'il 

ne fera pas à l'Auteur de cet Almanach le reproche d'avoir trahi le secret de l'Ordre. Il ne nous donne que des couplets, des chansons, des cantiques relatifs à la maçonnerie, & purement symboliques. 

Et il reproduit trois chansons qui sont à son avis ce qu'il a trouvé de mieux dans ces Etrennes et que nous n'avons pas encore trouvées ailleurs :

  1. Le Printemps (aux Profanes)

  2. Dans nos repas point de valets

  3. un cantique d'incipit l'ordre illustre des Francs-Maçons.

  • (aux pp. 218-227) Manuel des francs-maçons et des franches-maçonnes, nouvelle édition, enrichie de plusieurs cantiques analogues à ces deux Ordres (il s'agit du F ci-dessus). Le Camus estime que cet Almanach a cela de plaisant, c'est qu'il est fait de façon que les prétendus mystères de la maçonnerie y semblent dévoilés & mis au grand jour et il s'intéresse en particulier à l'historique de la Maçonnerie, qui est amusant & écrit d'une manière séduisante ; il y consacre plusieurs pages, où l'on retrouve les divulgations sur les rituels communes à l'époque, et qu'il commente avec commisération : Quelle folie ! Quel enfantillage ! Que ne prête pas l'imagination quand on veut s'y abandonner ? Il reproduit ensuite (pp. 226-7) une des chansons du Manuel, la bien connue lanterne à la main (dans la version à 5 couplets de la Lire, mais quelques mots différent) qu'il intitule Au beau sexe.

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